La robe rouge de Nonna est un album dont on fêtera l’année prochaine les 10 ans mais qui résonne encore d’actualité en cette période d’élections italiennes. Michel Piquemal, s’est inspiré du récit d’Isabelle Chatellard, illustratrice jeunesse, qui lui a raconté l’histoire vraie de sa grand mère italienne, émigrée en France dans les années 20 alors que l’Italie subissait le joug de Benito Mussolini. Magnifiquement illustré par Justine Brax, l’album, édité chez Albin Michel jeunesse, permet de découvrir et de se souvenir de l’histoire des opposants au régime fasciste.
Une histoire familiale
« – Nonna ! Pourquoi tu ne chantes qu’en italien ?
– Parce que je suis une « macaroni », figlia mia !
– Macaroni !?
– Oui, c’est ainsi qu’on nous appelait, nous les Italiens, quand nous sommes arrivés en France… »
Alors qu’elles cuisinent, la jeune narratrice et sa grand-mère Nonna chantent Bella Ciao, la célèbre chanson populaire italienne qui servit d’hymne à la lutte antifasciste des partisans pendant la Seconde Guerre mondiale.
La petite fille interroge alors Nonna sur son histoire et sur les raisons qui l’ont fait quitter son pays avec ses parents alors qu’elle n’était encore qu’une enfant.
L’album va ensuite retracer, de manière simple et vivante, le parcours de la famille de Bergame jusqu’à la France.
Parce que les parents de Nonna n’étaient pas croyants, parce qu’ils étaient des révolutionnaires, parce qu’on les empêchait de travailler, parce que les Chemises noires faisaient régner la peur par la violence et qu’ils ont commis des actes ignobles, ils ont empilé leurs affaires et ont quitté l’Italie.
La robe rouge
La force de cet album réside à la fois dans l’humanité et la sensibilité du récit mais également dans ses illustrations aux couleurs puissantes et symboliques.
Le récit que fait Nonna de son enfance est simple et ponctué d’expressions italiennes qui rendent la voix de la grand-mère audible et vibrante. On comprend à travers ses mots le poids de plus en plus lourd que faisaient peser les fascistes de son village, hommes d’église compris, sur la famille considérée comme « incroyante ». Le père battu, la mère sans amies, jusqu’à l’événement ultime : l’humiliation de la petite Nonna.
En pleine rue, aux yeux de tous, des Chemises noires l’arrêtent et lui demandent d’ôter sa robe rouge. Sa belle robe rouge cousue par sa maman. Elle se retrouve alors en culotte sur la place du village, humiliée. Parce que sa robe était rouge. La couleur des communistes.
Dès lors qu’on a touché à leur enfant, les parents comprennent que leurs vies sont en jeu et qu’ils doivent abandonner leur pays. Mais ils n’abandonneront pas la lutte puisque le père s’engagera dans la Résistance pendant la 2ème guerre mondiale.
Dans cet album, les émotions sont palpables et les dessins, aux teintes rouges et noires, évoquent avec beaucoup de sensibilité la menace du fascisme et son emprise sur le quotidien de cette famille. Les fascistes sont ici représentés sous les traits de loups aux yeux rouges sanguinaires et menaçants.
Les traits de crayon, hachures et autres collages, mettent en relief de manière très expressive les illustrations de Justine Brax, jouant sur les effets de matière, entre ombre et lumière.
Pourquoi lire La robe rouge de Nonna ?
La robe rouge de Nonna est un album nécessaire et touchant. Accessible et très évocateur grâce au texte de Michel Piquemal et aux illustrations de Justine Brax, il permet aux jeunes lecteurs de découvrir un pan de l'histoire du XXème siècle à travers une histoire familiale et humaine. L'incarnation de cette petite fille la robe rouge reste longtemps en tête, comme les paroles de la chanson Bella ciao, dont on trouvera les paroles complètes et leur traduction, ainsi qu'un texte documentaire, en fin d'album.
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