Mots Tordus et Bulles Carrées

Griffes ( Malika Ferdjoukh )

« Griffes« . Un titre simple et efficace. Qui dit beaucoup mais laisse une part de mystère, notamment grâce à la magnifique illustration de François Roca. Le dernier roman de Malika Ferdjoukh, publié aux éditions de l’Ecole des loisirs, nous plonge dans l’Angleterre du XIXe siècle. Et il évoque immanquablement des enquêtes de Sherlock Holmes. Une belle dose de féminisme et d’humour en plus.

Crimes à Morgan’s Moor

Le prologue du roman s’ouvre sur un vol d’enfant. Nous sommes dans un hôpital et une religieuse vient annoncer à une jeune fille-mère la mort de son nouveau-né. La scène tragique se teinte cependant de mystère. L’on comprend en effet rapidement que le bébé a, en fait, été confié à un couple. En échange d’une enveloppe bien remplie.

17 années plus tard, à Morgan’s Moor, un village perdu dans le nord de l’Angleterre, une diligence arrive. Elle est porteuse d’un malheur à venir puisqu’une des passagères, Miss Donalda Brown, vient annoncer la mort du juge Benedict Apley, un notable du village. Là encore, sur cette annonce plane le mystère puisque ce crime n’a pas encore été commis. En effet, la femme est une sorte de medium et elle a assisté en rêve à l’assassinat.

Pour couronner le tout, à peine descendue de la diligence, elle reconnait le meurtrier. Il s’agit d’Horton Palance, un homme brutal dont la main coupée a été remplacée par une griffe.

Alors qu’on découvre, sur les « prédictions » de la voyante le juge sauvagement assassiné chez lui, le procès d’Horton Palance est rapide et il est condamné à mort. Il laisse derrière lui une famille fragilisée par la mort de son épouse qui suivra de peu celle de son mari. Et deux enfants dont la vie ne sera plus jamais la même.

« – C’est lui ! Cet homme est un assassin ! Il a tué le juge Apley ! Je l’ai vu !
Elle braillait si fort, et dans un tel état de nerfs, qu’elle manqua choir entre les bras de la jeune Flannery, l’aînée des filles Cheviot de l’auberge, qui survenait juste derrière.
En moins d’une minute, les vociférations de l’inconnue avaient rameuté la bourgade entière, tout le monde accourut ; et la vie de Horton Palance bascula dans le cauchemar. »

3 ans plus tard, le fils Apley, Muir, est de retour chez lui après un long voyage sous l’oeil attentif de sa tante Vienna. Or, un nouveau crime sanglant et mystérieux a lieu. C’est cette fois la soeur du juge qui est assassinée dans sa propre chambre, sans que la porte n’ait été déverrouillée.

On appelle alors Scotland Yard, représenté par le superintendant Linwood Tanybwlch et son jeune adjoint Pitchum Daybright, diplômé en criminologie, pour résoudre ce mystère. Aidés malgré eux de Flannery Cheviot, la fille futée et curieuse de l’aubergiste chez qui ils résident, ils devront démêler les fils de cette affaire qui va vite se révéler complexe.

So british, so addictive

Malika Ferdjoukh connait les histoires familiales comme personne. Déjà autrice de nombreux romans traitant de manière originale de ce sujet (Quatre soeurs en est un parfait exemple), elle aime également s’adonner aux récits fantastiques ou policiers. On retrouve d’ailleurs une touche de tous ces genres dans Griffes.

Griffes, ce sont d’abord des personnages dont on découvre au fur et à mesure l’histoire familiale. Avec leur part d’ombre et de secrets. La famille Cheviot tout d’abord, avec ses deux filles, Flannery et Briony, malines et attachantes. Pas forcément du goût de Pitchum qui subira le surnom de « Pitch » tout au long du roman, malgré ses rectifications. La soeur ainée, grande adepte de Sherlock Holmes, est une jeune femme pétillante et vive d’esprit. Elle va vite devenir l’enquêtrice principale.

L’on découvre aussi les liens cachés entre les deux grandes familles liées par les deux crimes. Les Apley et les Palance sont en effet unis par l’amour (impossible ?) que se portent les deux enfants, Muir et Catriona.

« Bonjour, Catriona.
Un bruit de pas survint derrière elle, puis s’accorda au diapason du sien. Une main souleva son cabas, un bras offrit son appui. Un bras dont elle n’avait oublié ni la fermeté ni la si familière douceur, et sous lequel elle glissa naturellement le sien.
– Catriona, lui chuchota Muir. Ma douce, je te vois enfin… »

Sans oublier Keir Mohune, le taxidermiste, O. Henry, le braconnier, Miss Godden, l’infirmière. Chacun va participer, directement ou indirectement, à la résolution de cette affaire.

On se délectera également de cette atmosphère anglaise si romanesque. Celle que l’on trouve chez les grands écrivains anglais tels que Jane Austen, Charles Dickens ou Conan Doyle. Le scénario, complexe et plein de rebondissements, fait que l’on dévore ses pages, tout autant pour découvrir si l’amour va naitre ou renaitre que si l’on va découvrir et arrêter le meurtrier.

L’écriture rythmée et les chapitres relativement courts entrainent le lecteur dans une course mystérieuse et pleine d’émotions. Le passé des personnages se révèlera une source d’indices non négligeable, tissant des fils qu’on n’imaginait pas s’unir.

Pourquoi lire Griffes ?

Griffes est un roman qui réunira à la fois les adeptes de mystères et d'enquêtes à l'anglaise mais aussi les amateurs de sensations et d'émotions fortes, symbolisées par le paysage rocheux et forestier de Morgan's Moor.

Plébiscité par la critique, Griffes s'adresse à tous les lecteurs qui aiment être embarqués dans des histoires à rebondissements et qui aiment vivre des vies romanesques à souhait.

Un vrai plaisir de lectrice !

Prix et récompenses

  • N°1 du Top roman 2023 MTEBC

COMMANDER SUR

Pour lire nos chroniques sur Green Manor et Sally Lockart, la malédiction du rubis

Mots tordus

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Aller au contenu principal