Mots Tordus et Bulles Carrées

Grim, fils du marais (Gaël Aymon)

Grim, fils du marais, de Gaël Aymon, aux éditions Nathan, est une de mes plus belles surprises en littérature jeunesse ce mois-ci. Découvert par hasard au détour des rayons jeunesse de Nantes, l’illustration de couverture, dessinée par Violaine Leroy, ainsi que le titre doré évoquant les frères Grimm, auteurs célèbres de contes traditionnels, m’ont convaincue très rapidement. 

« Pas bouger. Surtout pas bouger. 

Je m’étais tellement aplati sur le sol que la glaise me bouchait une narine et collait ma paupière gauche. Quand les pas se sont rapprochés, j’étais trop épuisé pour demander autre chose à mon corps que de pas oublier de respirer, mais de le faire pas trop fort. »

Immédiatement plongé dans ce récit à la première personne, le lecteur découvre un jeune narrateur en fuite, pour une raison mystérieuse. Dans un décor plutôt hostile, celui des marais. Très vite, Jarvin, un homme au cheveux roux, nourrice de la Ruche, sorte d’élevage d’enfants de 0 à 8 ans, va le secourir.

Cette rencontre va changer la vie de celui que Jarvin va désormais nommer Grim (du nom des histoires et des légendes qu’il raconte aux enfants avant de dormir). Car Grim est muet. Et il est tout d’abord incapable de répondre aux questions sur son identité ou sur le lieu d’où il vient. Cependant, il va pouvoir rester dans la Ruche et être ainsi protégé. 

Un monde dystopique

Mais le calme est de courte durée dans ce monde dystopique créé par Gaël Aymon. Un silurien doit venir déposer un nouveau couvain (des petits que la Ruche élèvera ). Et chercher ceux qui devront devenir des apprentis et exercer un travail pour servir la Reine. Sauf qu’on ne « livre » aucun enfant. Et que Grim doit intégrer le Haras des Confins.

Ce monde, qu’on découvre très vite restreint et en voie d’extinction, s’organise, comme une fourmilière, autour d’une Reine qui a « produit » des humains destinés à effectuer une tâche précise (« combattants », « reproduisants », « construisants »). Mais aussi des créatures étranges telles que les « auxiliants« , surnommés « têtes creuses » et utilisés comme esclaves (le pronom « ça » les désignant les ramenant à un statut de chose).

Fêlé, l’auxiliant

Seulement Grim et ses compagnons vont découvrir qu’un complot se trame contre la Reine. Ils vont essayer de l’en informer avant que le royaume ne s’effondre. 

Pourquoi lire Grim ?

La force du roman de Gaël Aymon tient tout d’abord dans la narration à la première personne. Elle « noie » tout d’abord le lecteur dans ce monde inconnu et sombre, où règne les inégalités et les trahisons. 

Le langage utilisé par Grim, avec ses phrases négatives sans négation, son langage des signes, appris auprès de Fêlé, un auxiliant qui deviendra son ami, et ses réactions instinctives d’enfant solitaire qui découvre l’amitié, est percutant de justesse.

au coeur du marais

L’aventure de Grim est une odyssée poisseuse dans un monde en déliquescence. Mais le personnage principal est lumineux et profondément sensible. Les rencontres qui se font au fur et à mesure du voyage jusqu’au palais de la Reine nous permettent de découvrir des personnages secondaires attachants par leurs défauts. Innés ou développés dans cette société très hiérarchisée qui les utilise. 

C’est donc un roman qui offre un regard d’enfant sur un monde où la rébellion des uns remet en question les certitudes des autres. Et par la force de l’amitié auquel s’attache si fort ce petit bout d’homme. 

Une très belle lecture.

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(Mots Tordus)

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