Mots Tordus et Bulles Carrées

Millions (Frank Cottrell Boyce)

Que feriez-vous si vous trouviez 229370 livres sterling dans votre jardin et que vous n’aviez que 17 jours pour le dépenser ? C’est la question que se posent Anthony et Damian, deux frères d’une dizaine d’années, dans le roman Millions de Frank Cottrell Boyce, aux éditions Gallimard jeunesse

Damian et Anthony vivent avec leur père dans la nouvelle maison où ils viennent d’emménager après le décès de leur mère. Le plus jeune, Damian, est fasciné par les saints et les saintes, dont il connait la vie et la fonction sur le bout des doigts, et qu’il cite en toutes circonstances. Anthony, lui, est obsédé par le monde de la finance et par le passage à l’euro qui va avoir lieu quelques jours plus tard. Nos deux frères sont particuliers et dénotent auprès des enfants de leur âge. Par leur maturité et par leurs préoccupations, alors que leurs camarades sont plutôt passionnés de foot et de jeux vidéos.

Deux frères complices

Leur arrivée dans une nouvelle école va donc être très remarquée, n’en déplaise à leur père qui souhaiterait plutôt que ses fils soient juste « excellents ». 

Heureusement, Anthony est très protecteur envers Damian. Et il lui évite de nombreux ennuis, avec notamment la technique du « pas de maman« .

« – Ici, tous les Pringles sont à moi. Règlement intérieur de l’école. (Il a craché une rafale de miettes.)

– Tu n’as pas le droit de lui prendre ses Pringles. Il n’a pas de maman.

– Comment ça, pas de maman ? Tout le monde en a une. Même ceux qu’ont pas de père ont une mère. Et puis les Pringles, c’est trop bon.

– Elle est morte, a précisé Anthony.

Cou Roux s’est arrêté de mastiquer et il m’a rendu les Pringles aussi sec. Il a dit qu’il s’appelait Barry. 

– Content de te connaitre, Barry.

Anthony lui a tendu la main. Il croit beaucoup aux vertus de l’amitié. »

Malgré tous ses efforts et ceux de son frère, l’ambition de leur père est loin d’être atteinte. Car Damian n’arrive pas à passer inaperçu. Il va cependant recevoir « un don du ciel ». Ou plus précisément un sac de billets de banque jeté d’un train, alors qu’il a trouvé refuge dans son « ermitage », une cabane construite de bric et de broc auprès de la voie ferrée. 

Il décide très vite d’en parler à son grand frère, qui préfère gérer cela sans en parler à son père: 

« Si papa apprend ça, il devra le dire au gouvernement et, s’ils apprennent ça, ils voudront le taxer. A quarante pour cent – c’est-à-dire pratiquement la moitié. »

S’en suit alors toute une aventure pour garder secrète la possession de cette énorme somme. Mais aussi pour la dépenser rapidement. En effet, 17 jours plus tard, le pays passera à l’euro et les coupures ne vaudront plus rien. Le tout en essayant de faire le Bien.

l’humour décapant de Millions

Avec une drôlerie et un humour parfois cynique vis-à-vis des adultes, l’auteur mène tambour battant cette histoire folle d’un argent qu’il faut dépenser le vite possible, et dont les propriétaires souhaiteraient évidemment retrouver la possession.

Damian veut agir pour le Bien, au sens religieux du terme. Et cette volonté de devenir un « saint » le pousse à faire des choix dangereux ou douteux. Il va ainsi glisser une grosse somme lors d’une récolte de fonds, mettant en péril le secret ou encore payer des camarades pour faire des corvées à sa place ou tout simplement s’en débarrasser. 

Au passage, Frank Cottrell Boyce écorne une communauté peu recommandable : « les Saints des derniers jours » (souvent surnommés « mormons »), bien plus attachés aux biens matériels qu’ils ne veulent le montrer. Mais également toute une société britannique qui ne vit qu’autour de l’argent, enfants compris. Sans donner de leçons, Millions offre une critique sociale teintée d’ironie.

Les dialogues sont savoureux et le suspense se tend au fur et à mesure que le secret se révèle autour des deux frères, entre apparitions de saints et voisins curieux.

Une adaptation cinématographique pour Millions

C’est sans doute ce cocktail d’humour, de critique sociale et de suspense qui a lancé Danny Boyle, le réalisateur anglais (auteur de Trainspotting et Petits meurtres entre amis) dans l’adaptation au cinéma de ce roman en 2004.

Du rythme, du rire et de l’émotion

l’affiche du film
(Mots Tordus)

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