Romane et son petit chaton Minet sont inséparables.
Mais le chat s’éloigne alors que la famille de Romane est occupée à préparer leur retour de vacances.
Malgré les supplications de la jeune fille, ses parents n’ont d’autre choix que de prendre une décision difficile.
Réveillé au milieu de la nuit, Minet est surpris de trouver la maison déserte.
Seul dans un endroit inconnu, il décide malgré tout de retrouver sa maîtresse, peu importe ce que cela lui coûte.
La quête initiatique d’un chat abandonné
Un monde nouveau à explorer
Poltron Minet de Madd et Cédric Mayen commence par un acte tristement commun : l’abandon d’un animal domestique à la fin des vacances de famille.
Partant d’un fait et d’un traitement réaliste, le scénario de Cédric Mayen va rapidement prendre une toute autre tournure.
Et rien de mieux qu’un symbole fort pour trancher avec le monde réel.
Ainsi, Minet, jusque là chat domestique à quatre pattes, se retrouve sur ses deux pattes affublé d’un surnom qui le suivra tout au long de sa quête : Poltron.
Il faut dire que pour ce chaton, habitué aux caresses de son humaine, le monde sauvage n’est pas des plus accueillants.
Catégorisé comme « naturel », il doit apprendre les règles d’une société animale où l’on s’habille et on se tient debout.
Les auteurs décrivent une société a priori pacifique dont les lois sont érigées suivant des principes fondamentaux.
« Règle n°1 : on ne parle jamais des humains, ça pourrait les faire venir.
— Avare l’écureuil, Écureuil accro aux glands
….
Règle n°3 : Le respect est obligatoire. Toute agression sera durement réprimée, au contraire de l’entraide et de l’assistance qui seront récompensées »
En somme, ces règles de vie prônent la tolérance mais aussi, et de façon paradoxale, la méfiance.
C’est quelque chose que Minet va apprendre à ses dépens et qui servira de fil conducteur à l’histoire globale.
Cédric Mayen enrobe tout cela dans récit d’aventure lorgnant, au moins sur le premier tome, vers la fantaisie médiévale.
Le second fait la part belle aux dérives de la société humaine avec, en ligne de mire, les expérimentations faites aux animaux.
Le ton se veut plus moderne sans que l’aspect fantaisie soit totalement délaissé par les auteurs.
Une société ignorante de ses contradictions
Assez logiquement, l’être humain est la pire des menaces pour les villageois.
Ainsi, Cédric Mayen pointe l’oppression constante que font porter les hommes sur les différentes races animales.
Maltraitance, chasse ou expérimentation, l’Homme prend ses aises sur le monde animal.
Cependant, en adoptant le point de vue de Minet, chat de compagnie attaché à son « humaine », l’auteur se permet d’apporter certaines nuances.
L’ acharnement qu’éprouve Minet à retrouver Romane démontrent des liens forts.
On retrouve ce sentiment chez Chat Pourri, mis au ban de la société car il regrette son ancienne vie de chat domestique.
Si cette société prône l’égalité complète entre tous les animaux, elle se montre particulièrement méprisante envers celles et ceux qui ne respectent pas ses règles.
Le traitement des hérissons est assez symptomatique d’une politique qui, à partir de bons sentiments, peut dériver vers un système autoritaire.
Un monde en construction
Le tome 2 de Poltron Minet prend une tournure assez inattendue.
Alors que les auteurs auraient pu se contenter d’un anthropomorphisme imagé, il approfondisse le concept en cherchant à lui donner une « réalité ».
Si les raisons semblent assez évidentes, je trouve ce choix intéressant.
Sans trop en dévoiler, les liens humains / animaux prennent une autre tournure et plonge le récit dans des thématiques actuelles.
Beaucoup d’éléments donnent de l’ampleur aux personnages et notamment à Féroce renarde, fortement impacté par les révélations de ce volume.
Le cliffhanger de fin semble démontrer qu’ils ne comptent pas en rester là et on est impatient de voir où tout cela va nous emmener.
Fluidité et luminosité
Si j’avais critiqué le choix de couverture pour le tome 1, celle du tome 2 met tout le monde d’accord.
Elle est parfaite et représente assez bien tout le travail de Madd sur les pages intérieures.
Son trait est fluide et convient aussi bien aux êtres humains qu’aux animaux, humanisés ou non.
Ses environnements sont variés et détaillés. Le dessinateur se montre à l’aise autant sur les décors naturels que sur les salles de laboratoire aseptisé.
Sa mise en couleur est lumineuse et apporte une douceur à l’ensemble grâce à l’ajout de teintes vives.
Par certains côtés, on retrouve l’ambiance graphique des oeuvres de Nob.
Malgré un nombre conséquent de cases, les pages restent lisibles et nous émerveillent par certains découpages, notamment lors des scènes d’action, venant dynamiser l’ensemble.
En résumé
Poltron Minet de Madd et Mayen est une série jeunesse attachante et percutante.
On se prend rapidement d'affection pour la quête initiatique de ce chaton.
Si l'aventure prend des airs de fantaisie médièvale, le voyage de Poltron Minet va rapidement percuter la réalité humaine.
La tournure prise par le second volume étonne tout en approfondissant l'univers de la série.
Une franche réussite accentuée par le graphisme tout en couleur de Madd.
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