Mots Tordus et Bulles Carrées

Le combat d’hiver (Jean-CLaude Mourlevat)

En 2006, paraissait Le Combat d’hiver de Jean-Claude Mourlevat. A l’heure où grondent les dictateurs et où les peuples souffrent, dans l’Est de l’Europe ou au Moyen Orient, la relecture de ce roman d’aventure fantastique était terriblement d’actualité. Quatre adolescents, opposés à la tyrannie et portés par l’amour de la liberté, fuient le monde enneigé de leur orphelinat-prison. Ils reprennent la lutte de leurs parents, exécutés quinze ans plus tôt pour résistance.

Le froid de l’hiver et la chaleur humaine

Dans un monde soumis à la dictature, étouffé sous la neige et l’oppression, quatre jeunes filles et garçons survivent dans un orphelinat-prison.

Helen Dormann et Milena Bach, Milos Ferenzy et Bartolomeo Casal. Tous les quatre vivent depuis leur petite enfance dans un lieu soumis à des règles et des restrictions strictes. Ils sont sous surveillance car enfants de résistants, tués lors de la dernière guerre civile. Ils ne savent que peu de choses sur leurs parents mais une flamme brûle en eux : celle de la liberté.

Alors qu’elles se dirigent vers le village des consoleuses, ces femmes qui leur apportent le minimum d’affection vitale lorsqu’elles en ont besoin, Helen et Milena rencontrent Milos et Bartolomeo. Dès lors, cette relation va sceller leurs destins.

Milena et Bartolomeo vont prendre la décision de ne pas retourner à l’orphelinat. Au risque de faire punir à leur place un.e autre pensionnaire. Ils s’enfuient sur les traces de la mère de Milena, Eva-Maria, une chanteuse résistante célèbre, tuée par les hommes-chiens, sombres exécutants de la Phalange.

De leur côté, Helen et Milos vont se lancer à leur suite pour empêcher leur capture et leur mort.

Hommes-chiens, peuple-cheval et jeux du cirque

Comme souvent dans les romans de Jean-Claude Mourlevat, le monde imaginaire est à la fois proche du nôtre et empreint de mythologie. Ici, l’ancrage est clairement celui de l’occupation et des fascismes du XXe siècle. Mais de nombreux éléments évoquent aussi l’Antiquité, et particulièrement celle de l’Empire romain.

En effet, le Combat d’hiver dont il est question dans le titre, est un tournoi qui ressemble fort aux jeux du cirque. Les adversaires, sortes de gladiateurs, sont entrainés et formés par la Phalange. Les noms qu’on leur donne sont hérités du latin : Fulgur, Caïus, Myricus… L’issue du combat est la victoire ou la mort.

De même, les hommes-chiens (cynocéphales) dressés pour la chasse à l’homme ou les hommes-chevaux (qui rappellent les centaures) qui sont un peuple pacifique mais opprimé, font référence à l’imaginaire mythique.

La grande force de l’auteur est de créer un univers cohérent qui tisse toutes ces références et les insère dans une société totalement crédible et moderne.

Mais surtout, Jean-Claude Mourlevat a l’art de donner vie à des personnages profondément humains et complexes, auxquels on s’attache facilement. On vibre avec eux de cette envie de liberté, on frémit des dangers qui les menacent et on se réchauffe dans les bras de ceux qui deviennent leur nouvelle famille.

Même le plus terrible des ennemis est traité avec soin. En découvrant leur relation avec leurs « amis » ou leur passé, les lecteurs auront parfois de l’empathie pour eux.

Enfin, le roman est un hymne à la solidarité et à la résistance pacifique et silencieuse. Celle des maisons qui ouvrent leur porte aux fugueurs. Celle qui chante l’espoir et galvanise le peuple face à la violence du pouvoir tyrannique.

Pourquoi lire Le Combat d’hiver ?

Le Combat d'hiver de Jean-Claude Mourlevat est un incontournable de la littérature jeunesse ado et adulte. Grand récit d'aventure, empreint de références antiques et historiques, il met en scène quatre adolescents qui vont, chacun à leur manière, reprendre la lutte avortée de leurs parents. Une lutte pour la liberté contre le pouvoir oppresseur de la Phalange, un combat fait d'amour, de solidarité et de sacrifice. Un chant qui rallume la flamme de l'engagement et de l'espoir. 

Prix Sorcières et Prix des Incorruptibles en 2008.

Pour lire nos chroniques sur Salamandre et Le train pour la liberté

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