Maman est une fée (Nikola Huppertz/Tobias Krejtschi)

Fibie aime sa maman mais celle-ci a un comportement qui la fait passer pour une folle auprès de son entourage.
A de rares moments joyeuse et avenante, elle se renferme très souvent face au monde qui l’entoure.
Alors, Fibie doute. Est-ce que sa mère a toute sa tête ?
Oui, lui rétorque son père.  » Si ta maman est différente, c’est qu’en réalité, elle est une fée ! »

Le traitement de la dépression par le prisme de l’enfance

Complicité entre une mère et sa fille

La diversité de traitement des albums jeunesse ne cesse d’épater par la maturité des réflexions proposées aux jeunes lecteurs.
Alors que trop souvent, on se demande ce qu’on peut faire lire à nos chères petites têtes blondes, Maman est une fée de Nikola Huppertz et Tobias Kretjtschi démontre qu’aucun sujet ne doit être tabou.
Pas même celui de la maladie, ici la dépression ( peut être la bipolarité ?) qui ronge petit à petit un des parents de la cellule familiale.

Fibie aime sa mère, c’est indéniable.
Au début de l’album, elle partage avec elle quelques moments de complicité en dépit des ragots proférés sur elle.
Ces saletés de ragots lancés sans aucune considération pour la souffrance d’autrui.
Petit à petit, Fibie s’éloigne de sa mère.
Elle ne comprend pas ce qui lui arrive et, sans aucune explication, elle se met à croire aux racontars et autres idioties qui lui arrivent aux oreilles.

Si on peut juger la démarche du père un peu naïve, voire contradictoire, vu qu’il lutte contre le mensonge par le mensonge, elle a au moins le mérite d’apporter un peu de réconfort autant pour la mère que pour la fille.
Ainsi, il fait de sa femme malade un personnage extraordinaire.
En lui donnant une sorte d’irréalité, il permet d’apporter une raison à ses réactions mais aussi à ses disparitions (sûrement des hospitalisations).

A cet égard, certains regretteront une conclusion assez brusque mais les auteurs ont la volonté de ne pas donner toutes les réponses.
Ici, il n’y pas de morale.
La vie continue et on ne guérit pas d’une telle maladie par un simple coup de baguette.
Au final, c’est avant tout dans le regard de Fibie que les choses ont changé.
Grâce à son père, elle accepte mieux la situation et comprend qu’elle doit faire de son mieux pour vivre avec.

Des illustrations sobres et monochromes

Un père qui tente de réconforter sa fille

Les illustrations sont à l’image du récit : sobres.
Les décors, tous anguleux et géométriques amènent une certaine froideur qui renforce la sensation de mélancolie du texte.
Derrière cette palette couleur bleue rouge, se cache un trait simple, doux et élégant.
Par le teint blanchâtre de la peau d’où ressortent des nez roses, les designs des personnages peuvent paraitre austères.
Pourtant, ils n’en sont pas moins attachants, notamment ce père qui derrière cet air bedonnant cache une profonde tristesse.

Seules les ailes de fée en pointillés de la mère de Fibie apporte une forme d’irréalité jusqu’à, elles aussi, devenir pleines sur les dernières pages annonçant un départ proche.
Comme si cette imagerie fantastique avait pris le pas sur la maladie de la mère.

En résumé

Maman est une fée de Nikola Huppertz er Tobias Krejtschi est un album puissant qui n'hésite pas à traiter de la dépression sans chercher à épargner son lectorat. 

Que ce soit par les réactions d'incompréhension de la petite Fibie ou par la bienveillance d'un père, le récit navigue entre la dure réalité et une légère imagerie fantastique.
Les illustrations avec leurs monochromes de bleu et de rouge attestent de la sobriété adoptée par les auteurs pour refléter au mieux la mélancolie et la tristesse qu'engendre une telle situation familiale.


Un album émouvant qui prouve une nouvelle fois la grande richesse de la littérature jeunesse
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