Mots Tordus et Bulles Carrées

My Capricorn Friend (Otsuichi / Maseru Miyokawa)

Yuya Matsuda sait qu’un de ses camarades de lycée, Naoto Wakatsuki est victime de harcèlement.
Akira Kaneshiro, son « bourreau », est un voyou notoire.
Mais comme beaucoup de ses amis, il a trop peur pour intervenir et préfère détourner le regard.
Un soir, il tombe sur Naoto qui tient une batte de Base-ball ensanglantée entre les mains. Ce dernier lui avoue qu’il vient de tuer Akira

Le harcèlement : un fléau scolaire

Quand on travaille dans un établissement scolaire ou qu’on est soi-même parent, le harcèlement est un sujet qui revient inlassablement dans nos préoccupations.
Si ce dernier a évolué avec les réseaux sociaux, il reste aussi pernicieux (voir plus) qu’à l’époque où j’étais moi-même collégien.
Le manga étant la lecture privilégiée de nombreux adolescent(e)s,  je trouve important que les auteurs s’approprient le sujet pour les mettre en garde face à un danger qu’ils côtoient parfois sans s’en rendre compte. 

Harcèlement : Victime et témoin

Le harcèlement dans les mangas

Une de mes oeuvres fétiches est Silent Voice de Yoshitoki Oima.
Capricorn Friend d’Otsuichi et Masaru Miyokawa propose une vision plus restreinte mais tout aussi radicale.
Le manga met en image une trame qui mélange critique sociétale avec un brin de fantastique et de polar. 

En un seul volume, le scénario d’Otsuichi n’a pas de temps à perdre et tape, dès les premières pages, là où ça fait mal.
En effet, le manga commence par des extraits de faits divers tragiques pour démontrer quelque chose d’irrévocable : le harcèlement tue. 

Fermer les yeux sur le harcèlement

La peur du harceleur

A partir de là, on suit le parcours de Yuya, un jeune lycéen qui habite dans un immeuble et qui récupère sur son balcon des objets balancés par le vent.
Un jour, il tombe sur un article de journal lui révélant des évènements qui se dérouleront quelques jours plus tard.
Yuya n’est pas téméraire.
Il le dit lui-même : il a trop peur pour intervenir et mettre fin aux agissements d’Akira. 
Par ce biais, le scénariste dénonce la passivité de certains témoins dans les affaires d’harcèlement : les évènements sont connus de tous mais personne n’agit.
Cependant, contrairement à Silent Voice, celui-ci n’est pas complaisant, il a juste peur et, au vu de la brute et des dégâts qu’il a déjà causés, on peut comprendre sa réaction. 

C’est d’ailleurs ce que j’ai beaucoup apprécié dans ce manga.
On est toujours à la limite, ce qui rend le jugement difficile : peut-on en vouloir à Yuya de ne pas avoir agi plus tôt ? Et nous, qu’est-ce que nous aurions fait ? 

La violence amène à la violence

Une société violente

Cette limite explose quand on apprend que Naoto a tué son bourreau. 
Un certain malaise s’installe.
En tant que lecteurs, nous avons assisté aux violences subies par Naoto (et la suite ne donnera aucune « excuse » à Akira) mais peut-on cautionner un tel acte ? 
Yuya ne tranche pas la question mais en choisissant de l’aider, même si c’est pour éviter un autre drame, n’a-t’il pas fait son choix ?
Et Naoto est-il lui même d’accord avec cela ? 

La responsabilité. 
Je crois que c’est par cet axe qu’il faut comprendre cette histoire. 
Que ce soit Yuya, Naoto ou même Honjo (seule personne à avoir pris la défense de Naoto), tous ont commis des erreurs, tous font face à la culpabilité et devront prendre leurs responsabilités. 

On pourra regretter que l’approche d’Otsuichi prenne une tournure polar ramenant son intrigue vers une certaine moralisation.
Alors oui, elle enlève de la subtilité à un sujet que l’auteur a voulu sombre mais elle se termine avec une note d’espoir qui me semble nécessaire. 

La peur du harceleur

En résumé

My Capricorn Friend est un one shot puissant, dense et parfaitement mis en scène par Masaru Miyokawa. 
Le scénario d'Otsuichi, par sa radicalité, pourrait bousculer certains lecteurs mais cette radicalité me semble nécessaire pour faire comprendre toute la complexité et la nocivité du harcèlement scolaire. 

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Bulles Carrées

Pour lire notre avis sur : La meute et Dans les vestiaires

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