Alors que Bruce Wayne entame sa première année d’exercice en tant que Batman, un clown psychopathe sème la terreur au sein de la communauté de Gotham City.
Toujours la même histoire ?
C’est toujours un immense plaisir de retrouver le duo de Mister Miracle, Tom King et Mitch Gerads.
Pourtant, il faut avouer que ce Joker : the winning card n’avait rien de très existant.
Il faut dire que malgré mon respect pour le travail de Tom King, je ne suis pas fan de son run sur Batman.
La base était ambitieuse mais l’exécution fut laborieuse.
Mais pour sa défense, je pense qu’il est difficile voire impossible d’être totalement libre sur une telle franchise.
Ensuite, le vieux briscard que je suis a l’impression d’avoir lu cette histoire des millions de fois.
Certes, on aime tous le Joker mais ce conflit entre les éternels némésis commence à devenir redondant, non ?
Leur relation a été analysée des dizaines de fois et on peut se demander, en toute légitimité, ce que cette version pouvait apporter de plus .
Et pourtant, j’ai trouvé la lecture de Joker : the winning card assez plaisante.
Tom King a compris que les bases du Joker ont été posées depuis longtemps.
Ainsi, il crée un trait d’union entre 2 incontournables, Batman : année un ( Frank Miller / David Mazzuchelli ) et Joker : the killing Joke ( Alan Moore / Brian Bolland ).
L’intrigue peut même être considérée comme une suite directe du premier.
Ambitieux, voire prétentieux, me direz- vous ! Peut-être mais après de multiples tentatives de réécritures, il est agréable de constater que certains auteurs respectent encore le travail de leurs ainés, tout en apportant leur « petite » pierre à cet énorme édifice.
Le scénariste propose une des versions les plus glaçantes du Joker.
Sa psychologie tortueuse le rend terrifiant et surtout totalement insondable.
Bruce wayne, au début de sa carrière, n’est d’ailleurs pas encore prêt à affronter une telle menace.
Avec le Joker, il passe à un autre type de malfrat et ne s’en rend pas immédiatement compte.
La folie qui caractérisera une grande partie de ses ennemis, en est ici à son stade originel.
Le Joker n’a pas la moindre logique et il frappe selon son bon plaisir.
La première scène avec la petite fille est digne d’un thriller psychologique.
On sait qu’il va frapper mais on ne sait pas quand ni comment !
Le sens du dialogue de Tom King rend palpable la terreur qu’inspire le psychopathe.
D’une certaine façon, l’auteur imagine le Joker comme une version clownesque d’Hannibal Lecter.
Le scénariste imagine une trouvaille narrative intéressante.
En effet, une grande partie des dialogues du Joker sont retranscris dans des encarts rappelant le cinéma muet.
Cet effet apporte un côté irréaliste à la folie du criminel pour ensuite contraster avec cette cassure quand le « son » apparait pour la première fois.
D’ailleurs, l’effet miroir à une scène culte du récit d’Alan Moore pose cette question éternelle :
Qui est le plus cinglé des deux ?
Une folie surréaliste
Mitch Gerads est sans doute le collaborateur le plus plus fidèle et le plus régulier de Tom King.
Et on peut dire que depuis Sheriff of Babylon, les deux hommes se connaissent par coeur.
À l’instar du duo Ed Brubaker / Sean Phillips, on a nous aussi l’impression de les connaître sur le bout des doigts.
Mitch Gerads a énormément affiné son travail depuis ses débuts.
Sur Joker : the winning card, il adopte un style de plus en plus réaliste mais garde une patte graphique personnelle l’éloignant du photo réalisme.
Grâce à des couleurs impeccables et ses effets de grains si particuliers, le dessinateur crée une ambiance suffocante, reflet de la terreur provoquée par le clown.
À certains égards, on est face à un véritable thriller. Et les cadrages resserrés typiques de la narration de Tom King renforcent cet effet cinématographique.
Le dessinateur continue de nous surprendre avec des pleines pages saisissantes, dont un portrait du Joker tout bonnement cauchemardesque.
Une réussite absolue !
En résumé
Joker : the winning card de Tom King et Mitch Gerads traite le premier affrontement entre Batman et le clown psychotique comme un thriller psychologique suffocant.
Le récit de Tom King met en scène les premiers pas d'un Joker terrifiant et totalement imprévisible auquel Batman va devoir apprendre à faire face.
Mitch Gerads s'empare de cette histoire et y insuffle une atmosphère glaçante et un réalisme qui rend la folie du Joker encore plus implacable.
Au final, Joker : the winning card peut être vu comme une suite directe de Batman Year One qui se met dans les pas du Joker : the killing joke d'Alan Moore.
Le projet paraîtra prétentieux pour certains, ambitieux pour d'autres.
Pour ma part, si Tom King ne propose pas de réelles nouveautés, il réussit le pari de se mettre dans les pas de Frank Miller et Alan Moore en respectant tout simplement ce "passé lointain".
Pour lire nos chroniques de joker : the killing joke et Dragon rouge