Dès la couverture, on retrouve l’imagerie du labyrinthe sous toutes ses formes dans l’oeuvre de Jeff Lemire.
Mais comment a-t-il procédé pour en faire un élément majeur de son récit ?
Les codes narratifs de l’œuvre de Jeff Lemire
Le labyrinthe apparait rapidement dans l’oeuvre de Jeff Lemire.
On le croise une première fois sur les plans de la ville dessinés par William (page 11).
Sur la page suivante, nous découvrons tous les éléments narratifs essentiels à la compréhension de l’état d’esprit de William :
– Le fil rouge, extrait du pull de sa fille défunte, qui lui servira de fil d’Ariane
– Le labyrinthe, symbolisé ici par la ville mais que l’on retrouvera de différentes manières tout au long du récit
– les couleurs : rouge (pour le guide) , vert-gris (pour la réalité) et bleu (pour le fantasme)
Le labyrinthe dans la réalité
Cependant, il explose avec cette double page.
ici, on n’est pas dans le monde réel.
Ce labyrinthe prend la forme de l’Open Space que quitte William.
Le travail étant la dernière chose qui le relie à la réalité, on peut voir cette illustration comme le reflet d’un personnage qui s’échappe de la réalité pour se fondre dans un fantasme qu’il espère réel.
Un simple fil rouge comme guide
Le fil rouge qui apparaît dès la première page a une double symbolique.
C’est le fil qui guide William vers sa fille.
Comme Thésée, ce lien lui permet de le ramener à son but et il le suit sans se poser de question.
Le fil rouge, c’est celui aussi qui tient le récit que le lecteur doit suivre pour comprendre les tenants et les aboutissants de l’intrigue de Jeff Lemire.
La symbolique est d’une simplicité déconcertante mais aussi d’un efficacité redoutable (le mythe de Thérèse étant connu par le plus grand nombre).
Le labyrinthe fantasmé
Le labyrinthe est avant tout un symbole des rues tortueuses de la ville.
Et c’est cet aspect que l’on retrouve de plusieurs manières dans la narration de Jeff Lemire.
C’est à partir du chapitre 4 que William se retrouve dans ce que l’on interprète comme son imaginaire.
C’est à partir de ce moment aussi que le Labyrinthe devient un élément majeur de son récit.
Des pages 151 à 154, il apparait tout d’abord de manière subtile.
La mise en page reste classique, encore sous forme de cases alignées mais un petit chemin se crée au niveau des intercases.
Le lecteur peut d’ailleurs s’amuser à suivre ce chemin qui reflète assez astucieusement le sens de lecture.
C’est à partir de la page 155 que la labyrinthe prend forme.
La narration est faussement éclatée, les cases continuent de se suivre mais se touchent les unes les autres pour créer un chemin qui l’amènera à un souvenir.
Cette structure, on la retrouvera à plusieurs moments, de manières parfois plus éclatées.
On remarquera d’ailleurs l’importance de la couleur.
Le chemin qu’emprunte William est en bleu, c’est le fantasme, alors que le fond est en gris-vert (la réalité) : William est donc en dehors de la réalité.
Pour finir
Si Jeff Lemire n’est pas le dessinateur le plus flamboyant, il démontre avec le labyrinthe inachevé que c’est un metteur en scène hors pair.
La plupart des éléments narratifs ou de couleurs ont une importance et démontrent une véritable réflexion de son auteur.
Pour plus de précision, je vous conseille de lire le sketchbook qu’a retranscrit Futuropolis, à la fin du livre.
Vous pourrez découvrir la genèse de cet oeuvre mais aussi en apprendre un peu plus sur la méthode de Jeff Lemire.
Et vous pouvez aussi lire notre avis sur le Labyrinthe achevé sur notre site