Le détective privé Frank Sangaré débarque à Saint-Elme, petite ville réputée pour son eau de source.
Il enquête, avec l’aide de Madame d’Ombre, sur la disparition du fils de sa riche cliente : Arno Cavalièri.
Une enquête tout ce qu’il y a de plus banale, si ce n’est qu’à Saint-Elme, rien ne se passe normalement.
Un polar haletant

Saint-Elme, c’est tout d’abord un polar implacable.
Et Frank Sangaré , c’est un peu l’archétype du détective privé.
Le gars est un peu bougon mais non sans un certain humour (un peu pince sans rire) et un talent d’observation.
Et question look, on peut pas dire qu’il aime se faire remarquer.
Seule sa paire de lunette semble avoir de l’importance pour lui car « au vu du prix, il serait dommage de les casser. »
Mais le détective a du métier.
Lui et son frère (qui fera son apparition à la fin du tome 2) ont résolu des affaires complexes qui justifient une certaine réputation.
Et avec l’aide de Madame d’Ombre, il va assez rapidement remonter la piste de son fugueur.
Mais derrière cette disparition se cache un cas plus tortueux qui mêle l’incroyable source minérale de Saint-Elme à une affaire de famille.
Serge Lehman apporte une grande importance à la structure de son récit.
Aucun élément n’est anecdotique et la moindre réaction d’un personnage peut être réutilisée quelques tomes plus tard.
La psychologie est forcement primordiale et à ce niveau, la famille Sax est un cas d’école.
Entre une mère recluse, une fille qui essaie de gérer les affaires à sa façon, un fils à la ramasse et un père qui lutte contre l’influence du grand-père, on peut pas dire que les relations familiales soient au beau fixe.
Chacun a sa vision de l’avenir de Saint-Elme et les conflits, à venir, risquent d’être explosifs.
C’est d’ailleurs la grande force du scénario de Serge Lehman.
On ne sait jamais vraiment ce qui nous attend.
Souvent, à l’image du cliffhanger du tome 3, la tournure des évènements surprend.
D’autant que tout cela n’est que la partie émergée de l’iceberg.
A l’ombre du fantastique

Serge Lehman, romancier et scénariste, est connu pour ses récits de science fiction et son approche du fantastique mêlant modernité et hommage aux récits du passé.
C’est une vision globale qui lie l’ensemble de ses scénarios, de la Brigade chimérique à l’homme gribouillé, première collaboration entre Serge Lehman et Frederik Peeters.
Saint-Elme, avec son ambiance polar, peut paraître un peu différent.
Mais le récit puise malgré tout sa source dans un folklore omniprésent.
Plusieurs éléments, encore inexpliqués, sont égrainés tout au long de l’intrigue et créent cette tension si particulière à cette série.
Que ce soit cette invasion de grenouilles, le barman qui prédit la météo avec une exactitude folle ou cette jeune fille mystérieuse sortie d’on ne sait où, les questionnements sont multiples.
Or, si une piste commence à se dessiner au tome 3, elle est encore marquée par de nombreuses incertitudes.
Dans Saint-Elme, le fantastique n’est amené que par petites touches et rien ne semble pour le moment inexplicable.
Cependant, il est évident que c’est par ce biais qui viendront les nombreuses réponses qu’attendent les lecteurs.
Magistral Frederik Peeters

Des pilules bleues à Saint-Elme, Frederik Peeters fait partie des rares auteurs qu’on aime suivre avec attention.
Son trait, et notamment son encrage, est d’une fluidité et d’une élégance remarquable.
Sa narration et ses cadrages sont recherchés et inventifs, en particulier dans les scènes d’action.
En somme, on se régale de chacune de ses pages mais on aurait été déçu du contraire.
Là où il étonne, c’est dans sa gestion des couleurs.
Il a longtemps été assimilé à un auteur « noir et blanc ».
Jusqu’à encore dernièrement avec Oleg, il aime revenir à ce genre de simplicité, même si la couleur l’a rendu plus abordable pour un large public.
Reste que ma préférence s’est longtemps portée pour ses travaux noir et blanc.
Et pourtant, la colorisation de Saint-Elme m’a foutu une belle claque.
Que ce soit sur les couvertures ou à l’intérieur, la palette de Frederik Peeters dénote par son ambition graphique.
Son rôle devient vital et ses scènes monochromatiques amènent une ambiance oppressante et irréelle.
On comprend que certains codes couleurs ont un sens apportant une sorte de symbolisme encore mystérieux.
Au final, la couleur surpasse sa tâche habituelle et devient un outil narratif et scénaristique à part.
Une réussite qu’on aimerait voir plus souvent reproduite.
En résumé
Après une première collaboration fructueuse avec l’Homme gribouillé, Serge Lehman et Frederik Peeters reviennent avec un polar fantastique haletant.
Le scénario multiplie les mystères et les coups de théâtre et laisse le lecteur pantois d’admiration devant le travail graphique de Frederik Peeters.
S’il faut attendre la conclusion pour juger de l’excellence ou non de la série, on peut déjà dire que ces 3 premiers volumes montent à chaque fois d’un cran la tension et ne donnent qu’une envie : lire la suite.
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