Mots Tordus et Bulles Carrées

Tenir debout dans la nuit (Eric Pessan)

Face à la couverture du roman d’Eric Pessan, « Tenir debout dans la nuit » (aux éditions de l’Ecole des loisirs), j’ai immédiatement pensé à la fabuleuse chanson de JayZ et Alicia Keys « Empire state of mind » qui rend hommage à cette ville dans laquelle les rêves deviennent réalité.
Le mythique gratte-ciel new-yorkais trône en effet au centre de cette photo. 

Le titre cependant interpelle. Et là c’est à Richard Bohringer que je pense, à son blues autobiographique « C’est beau une ville la nuit » et à ses errances :

« C’est beau une ville la nuit, quand l’idée du bonheur se retranche derrière les portes closes, les volets tirés, les murs dressés.
Le crépuscule, lentement, se peuple des ombres expulsées des forteresses de l’amour.
Et tombent les masques de la bienséance, les âmes peuvent se mettre à nu. »

Et l’on comprend, dès les premières lignes du roman d’Eric Pessan, que c’est de cela dont il va s’agir : 

« Au début, au tout début, une fois la surprise et la douleur passées, c’est la colère qui m’a fait tenir debout. »

A la première personne, Lalie raconte son errance au cœur de la ville.
La jeune lycéenne est venue avec Piotr, un ami, et la mère de celui-ci pour quelques jours dans la grande cité. C’était une chance à ne pas rater, qui ne se renouvellerait pas. Nous la découvrons paniquée et perdue dans les rues alors qu’elle s’est enfuie suite à son agression. Son « ami », si généreux de l’avoir invitée, a exigé plus que de la reconnaissance…

Le récit suit donc le parcours de Lalie dans New York, de Brooklyn à Manhattan, au fil de ses rencontres et de flash-backs qui nous permettent de comprendre d’où elle vient et ce qui l’a mise dans cet état de colère et de honte.

L’écriture d’Eric Pessan est fluide et, malgré la dureté du sujet abordé, poétique.
La ville est en effet un personnage à part entière, une âme complexe et difficile à appréhender pour la narratrice, étrangère et seule au milieu d’un monde qu’elle ne connaissait que par les images et les clichés.
Mais, malgré la déchirure et l’angoisse, New York va se révéler une alliée pour cette jeune femme et elle va y découvrir sa force et sa détermination.  

J’entends ici de nouveau Bohringer : 

« La colère, ça fait vivre. Quand t’es plus en colère, t’es foutu. »

La langue d’Eric Pessan est parfois, hachée, à bout de souffle comme Lalie.
Parfois plus ample et souple quand les souvenirs reviennent ou lorsque la jeune femme prend son appareil pour apprivoiser la cité.
Une écriture qui colle à la peau du personnage et à son envol, notamment grâce à l’art.

Prix et récompenses

  • « Tenir debout dans la nuit » a obtenu la mention spéciale du prix Vendredi en 2020.

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(MotsTordus)

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