Mots Tordus et Bulles Carrées

Une dose de rage (Angeline Boulley)

C’est d’abord la couverture du roman d’Angeline Boulley « Une dose de rage » (« Firekeeper’s daughter », la fille du Gardien-de-Feu dans son titre original) aux éditions Nathan, qui a attiré mon regard. L’illustration de Moses Lunham (un artiste ojibwé) représente deux profils féminins se faisant face et formant un papillon, sous lesquels semblent prendre feu deux oiseaux. Le dessin, reprenant des symboles d’animaux-totems, est coloré. Il renvoie à l’imaginaire des « native americans », qu’on appelle en France communément indiens d’Amérique.

Entre thriller et récit initiatique

Ce roman très original est à la fois un thriller et un récit initiatique. En effet, si l’intrigue, somme toute assez classique, fait se rencontrer une jeune étudiante, Daunis, et un jeune agent infiltré du FBI, Jamie, se faisant passer pour un joueur de hockey pour enquêter sur des décès suite à des overdoses de méthamphétamine et qui va demander à Daunis de devenir son indic, l’autrice s’est beaucoup inspirée de sa propre expérience puisqu’elle est elle-même une autochtone ojibwée. Elle est originaire de Sault Sainte Marie, dans le Michigan, comme Daunis, l’héroïne du roman.


La particularité de cette région c’est un pont et un ferry régulier qui répartissent la ville entre le Canada et les Etats-Unis. La tribu ojibwée comporte 24000 habitants. Cette communauté autochtone est très organisée et entretient les traditions et la spiritualité des Anciens. 

C’est la complexité du récit qui en fait sa force. Angeline Boulley ne cherche jamais à simplifier le vocabulaire anishinaabemowin (la langue ojibwée). Elle décrit de manière vivante et touchante les rituels de son clan. Nous découvrons ainsi les pow wows (rassemblements religieux festifs) ou la hutte à sudation (tente sauna qui permet d’entrer en relation avec les esprits). 

Daunis, l’héroïne, est en effet très attachée à ces traditions. Elle est une jeune fille moderne (les sms qu’elle envoie ne la distingue pas des jeunes américains de son âge). Mais entre une mère blanche, Grace Fontaine, et un père autochtone, Levi Gardien-de-Feu, elle cherche sa place et souhaite intégrer officiellement sa communauté. On découvre à travers ce personnage une famille endeuillée mais un entourage présent. D’un côté, la famille maternelle, qui a subi la perte de David, l’oncle de Daunis, un professeur. Et l’affaiblissement de Grand-Mary, la grand-mère, qui se retrouve dans un établissement de soins à la suite d’un AVC. De l’autre, la famille paternelle, dont Levi, le père, est mort dans un accident, la tante Teddie, une femme forte qui dirige le clan, Mamie June, la grand-mère poète aux phrases mystérieuses et pleines de sagesse, et Levi, le demi-frère adoré de Daunis.

A cet entourage fortement présent, s’ajoutent les amitiés si importantes pour une jeune fille de 18 ans. Et surtout celle de Lily, sa meilleure amie. Autour d’elles gravitent aussi LJ, l’ancien petit ami de Daunis devenu policier. Et Travis, l’ancien petit ami de Lily, tombé sous l’emprise de la meth. 

Au-delà de la rage, découvrir la vérité

Et le thriller se met en place brutalement pour Daunis. Lily va se faire tuer sous ses yeux par Travis, qui se donnera la mort ensuite. L’enquête qui s’ouvre, menée en sous-marin par le FBI grâce à Jamie, le jeune hockeyeur sous couverture, et Ron, son partenaire qui se fait passer pour son oncle, vise à remonter la piste d’une variété de méthamphétamine. C’est une drogue aux effets puissants, « augmentés » par une substance liée aux rituels ojibwés.

Daunis veut découvrir la vérité pour rendre justice à sa meilleure amie. Mais aussi pour sauver les jeunes de sa communauté durement touchés par la drogue qui fait des ravages. Elle va donc se retrouver embarquée dans cette quête collective et personnelle à la fois. Car c’est également son identité profonde qui va se révéler. En même temps que des secrets de son clan peu avouables. 

Car Daunis tombe amoureuse, à son corps défendant, du jeune infiltré du FBI qu’elle a démasqué. Et avec lequel elle doit jouer un rôle crédible de couple, pour les besoins de l’enquête.

Un récit d’apprentissage

Construit en 4 parties, ce roman oriente vers les 4 points cardinaux symbolisant le départ, l’errance, la récolte et le repos. Daunis va emmener les lecteurs et les lectrices dans son sillage. Vers la vérité et la puissance des 7 enseignements (la vérité, l’amour, le respect, le courage, l’honnêteté, l’humilité et la sagesse). 

Les 7 enseignements

A ses côtés, l’on découvre l’univers ojibwé, le quotidien d’une jeune femme en quête de sens, pleine de force et de rage, la puissance de la communauté, la beauté de ses traditions et la noirceur de certaines âmes. 

Pourquoi lire Une dose de rage ?

Ce roman laisse son empreinte une fois le livre refermé et enrichit notre connaissance, il faut l’avouer très limitée, des tribus natives américaines.

Il est à noter que Netflix va adapter ce roman par la maison de production de Barack et Michelle Obama.

Un contenu supplémentaire est disponible grâce à l’appli Nathan live!

(Mots Tordus)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Aller au contenu principal