Hannah Green avait une vie bien organisée, pour ne pas dire ennuyeuse.
Des parents aimants, une tante excentrique et un grand-père baroudeur, aux petits soins avec sa petite fille.
Mais quand ses parents décident de s’accorder « une pause », elle n’imagine pas les nombreux bouleversements qui en découleront …
Des parents séparés, un séjour chez son grand-père et une rencontre inattendue avec … le diable !
Quand Hannah Green rencontre le diable
Il est n’est pas anodin de voir le nom de Neil Gaiman accolé à l’oeuvre de Michael Marshall Smith.
En effet, la filiation avec La vie ô combien ordinaire d’Hannah Green est évidente.
Même si Michael Marshall Smith est avant tout un spécialiste de l’horreur, il trouve ici un écho plus fantastique.
Son écriture, et notamment ses digressions narratives, sont autant de rappels à l’imaginaire de Neil Gaiman.
Car, vous imaginez bien, la vie d’Hannah Green ne va pas rester ordinaire bien longtemps.
Et le perturbateur n’est pas n’importe qui !
Affublé d’un costume noir et accompagné de son inséparable Gnome Palafre, le Diable n’est pas un rigolo.
Et, une nouvelle fois, comment ne pas penser à De bons présages quand on découvre pour la première fois l’ange déchu !
Caractériel, manipulateur et autoritaire, il peut abréger la vie de n’importe quel mortel, juste pour une simple déconvenue.
Avec une pointe de cynisme, l’auteur met en scène des morts aussi cruelles qu’inattendues.
Mais, après tout, c’est le Diable et on l’excuse, il n’est pas vraiment d’humeur.
Il faut dire qu’il n’a pas de quoi se réjouir. De retour, après une longue absence, sa position semble être remise en cause par un mystérieux adversaire.
Et pour y remédier, il va devoir faire appel à quelqu’un de tout aussi improbable.
Ainsi, le fantastique imprègne petit à petit le réel et, par écho, la vie d’Hannah.
Les objectifs sont clairs mais la direction n’est pas vraiment rectiligne et prend des tournures, par moment, étonnantes.
Ainsi, si Hannah ( et sa famille ) reste au centre du récit, l’auteur prend aussi le temps d’accorder une attention particulière à des personnages secondaires ou qui nous semblent secondaires.
Cela donne une structure de récit incongrue, originale mais qui n’échappe pas à quelques problèmes de rythme.
La seconde partie, notamment, est peut être un peu longue, surtout au vu de l’impact sur le reste du roman.
Heureusement, la troisième et dernière section est captivante.
On sent ici toute l’expertise de Michael Marshall Smith qui s’amuse à nous faire frissonner dans une apothéose cauchemardesque.
Au final, Hannah se retrouve à sauver le monde tout en préservant sa famille.
Une famille en recomposition
La vie ô combien ordinaire d’Hannah Green est une quête initiatique.
Mais celle-ci concerne autant Hannah que le reste de la famille.
En effet, bien avant l’arrivée du Diable , c’est la séparation soudaine de ses parents qui brise sa tranquillité.
Si celle-ci n’est pas actée, on comprend que Kristen, la mère d’Hannah, souhaite s’éloigner de son mari.
Rien ne prévoyait cette rupture, juste l’usure d’une vie de couple.
Car si Hannah se plaint de la banalité de sa vie, c’est surtout ce sentiment qui prédomine chez sa mère.
Au final, cette séparation engendre les événements qui suivront. Le départ d’Hannah pour chez son grand-père et sa rencontre avec le Diable sont la conséquence de cette rupture.
Derrière ce voyage endiablé, on découvre une famille en rupture qui doit apprendre à vivre avec ce nouveau statu quo.
Hannah est forcément attristée, surtout qu’elle ressent le désarroi de son père.
« Elle savait que leur vie était partie en sucette, mais si c’était grave au point de faire pleurer son père, alors ça allait encore plus mal que ce qu’elle pensait. »
Malgré tout, Michael Marshall Smith ne rejette pas toute la faute sur la mère.
S’il se met à la place d’Hannah, il exprime aussi les ressentiments de Kirsten.
Au fond, c’est la tristesse qui prédomine leurs rapports et qui, notamment du côté d’Hannah, se transforme en rancoeur.
Il n’y a rien de plus banal que la fin d’une histoire d’amour et, que ce soit la jeune fille, sa mère ou son père, ils vont devoir apprendre à vivre malgré cet « échec ».
Au final, si le fantastique impacte leur vie, c’est avant tout une « excuse » pour des retrouvailles afin de briser les non dits et autres secrets familiaux.
En résumé
La vie ô combien ordinaire d'Hannah Green de Michael Marshall Smith est une quête initiatique familiale et fantastique où une jeune fille fait face aux nombreux bouleversements de sa vie.
Le récit et l'écriture de Michael Marshall Smith, influencée par la prose de Neil Gaiman, n'échappe pas à la comparaison mais s'en sort grâce au traitement d'une cellule familiale attachante.
Le récit souffre d'un ventre mou sur une deuxième partie un peu trop longue mais explose sur une troisième, à l'ambiance quasi horrifique.
Au final, le fantastique sert d'excuse pour aborder la séparation et les bouleversements familiaux qui en découlent.
Pour lire nos chroniques de De bons présages et La peau de chagrin