Le grand vide (Léa Murawiec)

Manel Naher est une jeune femme atypique.
Ne se préoccupant pas du monde qui l’entoure, elle passe son temps dans une des dernières librairies de la ville tout en préparant sa fuite pour le grand vide.
Car dans la société où elle vit, le nom est si important que le négliger peut être signe de mort.
Et quand on a un homonyme célèbre, il n’est pas simple de se faire une place.

Un graphisme atypique

Un trait tout en rondeur, et des exagérations anatomiques à foison

Les éditions 2024 ont l’habitude de proposer des récits hors norme avec des dessins qui sortent de l’ordinaire.

Le grand vide de Léa Murawiec ne déroge pas à la règle.
Un trait tout en rondeur, le choix du noir et blanc (agrémenté de quelques rares couleurs en monochrome pour la ville), tout semble être fait pour nous rappeler les marqueurs d’une bd indépendante qui s’assume.

Et à première vue, je ne suis pas forcement le public de ce genre de délire.
Si j’aime ses exagérations anatomiques et sa mise en page variée et dynamique, j’ai plus de mal avec certaines approximations qui donnent l’impression que certaines cases ont été faites « à la va-vite ».

L’art moderne en quête d’inspiration

Pourtant, il est indéniable que la jeune autrice a du niveau et les références artistiques semblent démontrer une certaine connaissance artistique.
Cependant, il est indéniable que ces choix risquent de l’éloigner d’un public ( je pense notamment aux adolescents) pour qui son histoire aurait pu avoir un certain écho.

Mais un scénario d’une grande modernité

Un société obsédé par le nom

Pourtant, malgré mes réticences graphiques, l’oeuvre de Léa Murawiec m’a énormément plu.

Dans la société de Manel, le nom prime au-dessus de tout.
On lui accorde toute notre attention, on organise même des fêtes (quasiment sectaires) où on le proclame à haute voix pour lui donner une importance.
Dans cette société, le nom apporte la popularité, la richesse et même la santé.

Et forcément, comment ne pas voir dans cette approche une critique acerbe et cynique de notre propre société ?
Une nouvelle fois, c’est un monde futil alors qui délaisse ce qui peut l’enrichir (la désertion de la librairie en est le parfait exemple).

Une oeuvre qui échappe à la moralisation

Cependant, Le grand vide n’est pas un récit moraliste.
Pourtant, Manel a le profil type de la rebelle.
Elle ne veut pas rentrer dans le moule et ne cherche qu’à s’échapper avec l’aide de son meilleur ami, Ali.
Elle se sent forte. Du moins, jusqu’à ce que la réalité la rattrape.
Frôler la mort l’amènera à se plier à la règle, quitte à renier ce qu’elle est et ceux qu’elle aime.

D’une certaine façon, l’autrice met en garde les rebelles de tout bord qui peuvent aussi avoir la morale facile.
Lutter contre les errements du monde n’est pas chose facile.
Cela demande du courage et n’importe qui peut se retrouver de l’autre côté de la barrière du jour au lendemain.

En résumé

Derrière un graphisme qui peut rebuter, Le grand vide est avant tout une oeuvre qui nous présente une société extrême pour mieux nous mettre le nez dans nos propres égarements. 
Le grand vide se lit avec délice et la finesse d'esprit de son histoire plaira à tous ceux qui aiment interroger la société dans laquelle nous vivons .

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