Mots Tordus et Bulles Carrées

The Ex people (Stephen Desberg/Alexander Utkin)

En pleine période de croisades, les Ex people, sept pèlerins dont des animaux doués de parole, mettent un terme à leur quête.
Après avoir amassé une belle fortune lors de nombreuses expéditions, le groupe s’apprête à payer sa dette pour mettre fin à sa malédiction et retrouver un semblant de vie.
Cependant, l’offrande doit être remise devant Dieu.
Et pour que leurs fautes soient pardonnées, l’argent ne doit provenir que de nobles actes.
Et on ne récolte pas autant d’or que par de bonnes actions.

7 mercenaires et une croisade

Une galerie de personnages atypiques

Un groupe hétéroclite uni par une malédiction commune

Dès la couverture, notre regard est attiré par cette équipe à tout point de vue hétéroclite.
Au centre de ce groupe, nous retrouvons Blaise, un jeune écuyer dont la tête est restée coincée dans le casque de son seigneur.
Très vite, il est rejoint par une jeune adolescente enflammée. Cette dernière a été accusée de sorcellerie et en a subi le châtiment.
Les autres membres sont du même acabit.
Un nain guerrier tout droit sorti d’un récit de fantaisie qui rêve de grandeur, une archère magnifique et même un perroquet, un cheval et un chat, un peu trop bavards à leur goût.

Stephen Desberg débute son récit par ce qui semble être sa conclusion.
Puis, par de nombreux retours en arrière, il nous amène à la rencontre de chacun des membres du groupe.
Si quelques tensions se font sentir au sein du groupe, ils restent majoritairement soudés dans l’adversité.
Ils apprennent à se connaitre et pour certains à intensifier leur lien qui pourrait amener à des relations plus intimes.

Du fantastique à l’époque des croisades

En pleine bataille

Le récit se déroule lors des guerres de croisade, dans une zone géographique allant d’un château de la France à la grande cité de Jérusalem.
Ce choix n’est pas anodin.
A une époque où la religion fait partie du quotidien de la société médiévale, on comprend aisément pourquoi ces héros se lancent ainsi dans une croisade pour tenter d’expier leurs fautes.

La situation même du groupe tient du fantastique.
Tous morts dans des conditions qui nous seront contées petit à petit par Stephen Desberg, ils forment un groupe atypique lié par des anomalies dont ils aimeraient être libéré.es.
Tous.tes frappé.es par une malédiction, le groupe s’engage dans une chasse aux trésors pour payer leur « guérison » à un moine peu scrupuleux.
En effet, leurs particularités font d’eux des femmes, des hommes et des animaux à part.
Ce ne sont plus des êtres normaux, ce sont des Ex People.
Le fantastique ne se manifeste qu’à travers le passé et les exploits de nos personnages alors qu’autour d’eux le cours de l’Histoire n’en est que peu impacté.
Les combats entre croisés ont bien lieu mais les héros ne font partie d’aucun camp.
Ainsi, quand le devoir l’exige, ils n’arrivent pas à s’attaquer autant aux chrétiens qu’aux musulmans.

A ce niveau-là, l’intrigue du scénariste vogue entre plusieurs eaux, se frottant à l’histoire et au fantastique.
Sur le second volume, il axe son récit vers une romance qui s’annonce dès les premières pages et clôturera cette histoire.
On peut d’ailleurs regretter que l’aventure s’arrête brutalement.
Au fil des pages, le scénariste a constitué un groupe attachant en dévoilant leurs passés tortueux.
Il est dommage qu’une fois unis, l’histoire s’arrête en si bon chemin.

Un graphisme aussi atypique que ses personnages

Un graphisme quasi pictural

Bizarrement, la grande force de cette série est aussi celle qui la rend, au départ, difficile d’accès.

Le dessin d’Alexander Utkin risque d’en désarçonner plus d’un.
Auteur d’origine russe à plusieurs casquettes (designer mais aussi musicien), il se fait remarquer par le biais de deux bandes dessinées consacrées au folklore russe : le roi des oiseaux et la princesse guerrière chez Gallimard.

Son style pictural se démarque par un encrage et des couleurs charbonneuses.
Chose que l’on retrouve dans The Ex People et qui donne une (fausse) impression de négligé.
Pourtant, quand on se donne la peine de passer outre cette première impression, on se retrouve face à un style foisonnant aux multiples références et à la mise en page percutante.
Il est d’ailleurs amusant de voir comment l’auteur intègre ses influences, à l’image du cheval qui reprend les mêmes postures que celui du Guernica de Picasso.

S’il n’a pas son pareil pour croquer la nature humaine, comme il l’a prouvé sur le Roi Oiseau, son trait, par moment caricatural, correspond à merveille aux deux membres masculins du groupe, notamment Blaise à qui il offre de beaux moments d’action.
Ses exagérations corporelles renforcent l’aspect fantastique du récit.

Certes, le dessin d’Alexander Utkin est éloigné des graphismes habituels de la fantaisie adolescente.
Malgré tout, le travail qu’il produit sur celui-ci est juste phénoménal et mérite largement qu’on s’y attarde.

En résumé

The Ex People de Stephen Desberg et Alexandre Utkin est un diptyque historico-fantastique original.

Que ce soit par la composition de ce groupe ou par le dessin d'Alexander Utkin, qui ne laissera personne indifférent, The Ex People mérite qu'on s'attarde sur cette croisade atypique et plutôt réjouissante.


On regrettera seulement une intrigue, en forme d'introduction, qui aurait mérité pour le coup une aventure plus conséquente.

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