Mots Tordus et Bulles Carrées

Homère in the city (Cécile Alix)

Depuis ma découverte d’A(ni)mal, son précédent roman, j’attendais avec impatience de replonger dans l’univers profondément humain et touchant de Cécile Alix. C’est chose faite avec Homère in the city, dont la couverture, réalisée par Nicolas Galkowski, nous accueille par la douceur d’un sourire et d’un regard.

Une vie percutée

Que fait ce jeune cavalier noir, la tête protégée par un casque de moto, monté sur un cheval altier, au milieu des tours grises ?

Lui, c’est Solomon, comme Solomon Burke, un soulman américain que ses parents adoraient. Mais il préfère qu’on l’appelle Sol. Il a 17 ans et il vit avec son père Melvin au Pont-des-Chèvres, un quartier qui n’a rien de bucolique. Sa mère est absente et on devine très vite la blessure qui cisaille les coeurs du père et du fils. Une faille douloureuse et silencieuse qui les fait vivre côte à côte.

Heureusement, ils sont bien entourés. D’abord, il y a Aurélien, dit Tatepa, son copain d’enfance, fan de moto, sa mère et son beau-père, toujours présents. Et puis, il y a les chevaux. Ceux que Sol va retrouver en secret et à distance, perché sur son arbre, près du centre équestre et qu’il a appris à connaitre sans en avoir jamais approché un.

Il travaille dans l’EHPAD des Bleuets en tant que stagiaire en CAP assistant technique en milieux familial et collectif. Comme son père. Parce qu’il faut travailler et qu’il ne l’a pas fait à l’école. Il est taciturne et porte parfois un regard froid sur les pensionnaire de la maison de retraite. Et c’est dans cette vie plutôt grise qu’il avance, sans véritable objectif, le coeur prêt à imploser.

Mais deux événements vont venir bouleverser sa vie : l’accident de Tatepa à moto, qui va faire perdre l’usage de ses jambes à son meilleur ami, et la rencontre avec Mélissa, une jeune fille atteinte de vitiligo, une maladie qui dépigmente sa peau et y forme des constellations. La mort qui frôle et l’amour qui percute.

Une évidence

Alors que Tatepa se bat en rééducation pour retrouver la force de vivre et d’être indépendant, Sol apprend au contact des résidents de l’EHPAD à sentir, à écouter et à aider. A s’ouvrir et à laisser sa carapace se fissurer petit à petit. Comme le renard dans le Petit Prince, il s’apprivoise et accepte qu’on ait besoin de lui et qu’il ait besoin des autres. Avec Jade, M. Gourdon, Mme Brahim mais aussi Mélissa, il découvre les hauts et les bas de la vie, la force d’un sourire.

Et la générosité.

En effet, Tatepa lui offre la somme qu’il obtiendra en revendant sa Yamaha, désormais inutile, pour s’acheter un cheval. S’offrir son rêve.

La rencontre avec Homère, le cheval du Havre de Leïa, ressemble plus à des retrouvailles qu’à une découverte. Comme si ces deux-là étaient faits pour être ensemble. A son contact, Sol s’ouvre à la nature, à l’indicible, au sensible. Homère va faire souffler un vent de beauté, de douceur et de puissance dans le coeur du jeune homme. Y faire germer des graines de confiance aussi.

Jusqu’au projet qui va remuer le Pont-aux-chèvres et créer l’événement dans le quartier pour le retour de Tatepa : accueillir dignement son meilleur ami avec Homère, au milieu des tours grises.

Pourquoi lire Homère in the city ?

Cécile Alix nous offre ici encore un récit plein d'humanité et de tendresse. Ses personnages que la vie a abimés mais que l'amitié, l'amour et les rencontres, parfois improbables, vont accompagner et faire grandir, sont profondément attachants.

Elle n'a pas son pareil pour dire ce qui nous ronge, nous fait vibrer et rend la vie plus lumineuse, enSOLeillée.

L'écriture, souvent souple et fluide, parfois percutante et claquante, emporte autant dans les moments de tensions que dans les pauses poétiques. Une playlist accompagne d'ailleurs la fin du livre et l'on reconnaitra la musique et le rythme varié de son écriture dans des titres aussi divers qu'Eminem, Schubert ou les Doors

Si l'Odyssée de Sol n'est pas un voyage au long cours, elle n'en reste pas moins dense et pleine de réflexion sur ce que nous sommes face aux aléas de la vie. Sur ce que l'animal peut nous offrir aussi, dans cette relation d'amitié respectueuse de ce qui fait de nous des êtres uniques.

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Mots tordus

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