Kaléidoscope (Brian Selznick)

Sans doute connaissez-vous déjà Brian Selznick, auteur et illustrateur jeunesse, sans le savoir. Il est, en effet, l’auteur du roman « L’invention de Hugo Cabret« , adapté au cinéma par Martin Scorsese en 2011. En 2021, en plein confinement aux Etats-Unis, il se lance dans l’écriture d’un récit illustré original et étrange : Kaléidoscope. A travers 24 courts chapitres, organisés en 3 parties (matin, après-midi et soir), il se propose de raconter l’histoire d’une amitié entre deux jeunes garçons, le narrateur et James. Une amitié forte et fidèle, à travers l’espace et le temps.

Un récit fragmenté

Kaléidoscope est un livre singulier. Ce récit fragmenté en 24 chapitres peut désarçonner à la première lecture. Les lieux, les époques, les narrateurs et les genres se suivent et ne se ressemblent pas. Du moins, en apparence.

En effet, la clé de cette histoire tient dans son titre et dans le texte préliminaire :

« Vas-y, me dit-il. Regarde dedans. »
Je pris le kaléidoscope et collai l’oeil dessus.
« C’est beau. »
Puis je le fis tourner,
et les miroirs et les fragments de verre
se déplacèrent, fracturant le monde.
« Maintenant, regarde-moi », reprit-il.

Le projet de Brian Selznick est donc de faire le portrait de James, l’ami du narrateur, à travers les yeux de ce dernier et dans des situations et des personnages divers et variés.

Tour à tour roi de la Lune, aventurier, inventeur de Machine ou camarade de classe, s’il prend des apparences différentes ou évolue dans des univers imaginaires variés, il n’en reste pas moins fidèle, savant et courageux. Un ami proche, sur qui le narrateur peut compter.

Chaque fragment est une vision de James et de l’amitié qui lie les deux garçons.

Mais l’on comprend assez vite que James a disparu. Est-il mort ? Est-il absent ? N’est-il qu’un ami imaginaire ? Quelque soit la réponse, son absence est cruelle et le narrateur, par ses différents récits, souhaite lui redonner vie et présence.

Une expérience de lecture

Kaléidoscope est un roman riche et complexe.

Par sa construction en l’équivalent d’une journée (24 heures et 3 moments, du matin au soir).
Mais aussi par ses illustrations fines et évocatrices, en noir et blanc, toujours doubles (l’une vue à travers le kaléidoscope et l’autre sans).
Et par ses strates de lecture également.
En effet, le symbolisme des récits laisse une grande part à l’interprétation du lecteur, même si des clés et des thèmes récurrents ont été savamment semés dans les chapitres (la pomme, la porte, le livre, la clé…).

Faire tourner une clé dans une serrure imaginaire

Il faut se laisser porter et embarquer, à l’image du navire de la première de couverture. Car ce récit en vaut la peine. On pensera évidemment aux Mystères de Harris Burdick de Chris Van Allsburg (également auteur de Jumanji).

Même si une douce nostalgie règne dans ses pages, le roman est aussi l’occasion pour l’auteur de mettre en valeur l’amitié et de réfléchir aux métamorphoses qui jalonnent le passage de l’enfance à l’âge adulte. A l’image de la chrysalide qui est source d’interrogations pour le narrateur dans le chapitre du même nom.

– Tout se liquiéfie, comme sous l’effet d’une potion magique. A l’intérieur, de petits groupes de cellules qu’on appelle des disques imaginaux se mettent à grandir, un pour chaque organe du papillon. Il y en a un qui devient les pattes, un autre les antennes, ou les ailes. A la fin, il ne reste presque rien de la chenille du début, à part ses souvenirs.

Enfin, Kaléidoscope est une déclaration d’amour à l’imaginaire et au pouvoir des histoires, qui peuvent consoler et redonner vie à des êtres perdus.

Pourquoi lire Kaléidoscope ?

Kaléidoscope est un roman étrange et surprenant mais qui touche par son histoire d'amitié. Si les lecteurs y glissent un oeil, ils pénètreront dans un univers fragmenté mais symbolique, riche et mystérieux. Le voyage à travers les espaces et les temporalités, à travers la réalité et l'imaginaire, mérite d'être vécu et laissera sans doute des questions ouvertes. Mais quelle expérience !

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