Willow est une jeune fille solitaire.
Tout lui est insupportable : la bêtise de ses camarades comme l’autorité de sa soeur.
Seule la forêt lui apporte un réconfort nécessaire à des sentiments qu’elle tente tant bien que mal de réprimer.
C’est dans cette forêt qu’elle fait la rencontre de Pilu .
Après une dispute avec sa mère, l’étrange jeune fille fugue mais semble regretter cette décision.
Ainsi, Willow va l’aider à retrouver le chemin de sa famille.
Faire taire sa colère et sa tristesse
Pilu des bois de Mai K. Nguyen est un comics jeunesse attendrissant et émouvant.
À travers le portrait de Willow, on découvre la tristesse d’une jeune fille qui se terre dans la solitude.
Persuadée que sa soeur ainée est incapable de la comprendre et ne pouvant aucunement compter sur ses camarades de classe, elle entre dans une fureur qu’elle-même ne contrôle pas.
Cette colère, engendrée par sa tristesse, explose à des moments inopportuns, rendant sa nécessité encore plus incompréhensible pour son entourage.
Lin, sa soeur ainée, pour aider son père, se retrouve soutien familial et les discussions avec Willow sont de plus en plus tendues.
La perte de leur mère les a éloignés et ils ne sont plus capables de communiquer sans se disputer.
La tragédie a bouleversé leur vie et, si les « adultes » tentent de garder le contrôle, Willow n’en a ni la volonté, ni la force.
Surtout quand ce ressentiment est teinté d’une profonde rancoeur.
De façon astucieuse, ces sentiments contrastés sont symbolisés par des petites créatures que Willow enferme dans un bocal.
Omniprésentes, elles reflètent l’état d’esprit de la jeune fille.
La rencontre avec Pilu apporte un contrepoids à cette première partie emplie d’amertume.
Pourtant, la mystérieuse jeune fille ne semble pas plus heureuse.
En pleurs, elle s’est perdue après une fugue qu’elle regrette rapidement.
Pilu se sent rejetée par sa mère et et ne trouve pas sa place à côté de ses nombreuses soeurs.
Une nouvelle fois, le manque de communication est latent et la jeune fille ne saisit pas la chance qu’elle a d’avoir encore une mère à qui faire ce genre de reproche.
D’une certaine façon, Pilu est le reflet d’une partie des rancoeurs de Willow qui n’a pas su exprimer son amour à temps et qui doit trouver un moyen de se séparer de cette colère.
Une nature fantasque et merveilleuse
En plus d’être un récit touchant sur la famille et le deuil, Mai K. Nguyen écrit une ode enchanteresse à la nature.
Graphiquement, le trait tout en rondeur de l’autrice apporte une douceur réconfortante à la lourdeur de la thématique.
Les formes sont souples, les couleurs lumineuses et les décors foisonnants.
Comme pour beaucoup de comics jeunesse, on sent cette influence teintée de mangas et de dessins animés.
Le design de Pilu est d’ailleurs un merveilleux combiné de cette approche.
Dans Pilu des bois, la forêt est au centre de tout.
Elle est liée à des souvenirs radieux pour Willow où elle découvrait cet environnement aux côtés de sa mère.
D’une certaine façon, elle revit la même chose auprès de Pilu avec laquelle elle continue cette exploration, tout en apportant un peu de savoir aux plus curieux des lecteurs.
Du symbolisme des magnolias au rôle des champignons, le forêt est un univers interconnecté où chaque élément joue un rôle prépondérant.
Pilu et sa famille font partie de cette interconnexion.
Et, par le biais de ce « voyage » avec Willow, elle doit apprendre à retrouver sa place au sein de sa propre famille.
En effet, les adultes ont des responsabilités et des inquiétudes que les enfants ne saisissent pas toujours.
Or, il n’y a qu’une façon d’éviter les quiproquos ou les disputes involontaires : la communication.
C’est certainement la grande morale de Pilu des bois.
Pour mieux comprendre les autres, il faut apprendre à accepter ses propres ressentiments,.
En résumé
Pilu des bois de Mai K. Nguyen est un récit tendre, familial et un hymne aux merveilles de la nature.
Par le biais de deux jeunes filles perdues et en colère, l’autrice explore les ressentiments, les contradictions et la tristesse qui peut s’emparer d’un enfant dans les moments les plus tragiques de sa vie.
En symbolisant cette colère par des petites créatures enfermées dans un bocal, Mai K. Nguyen nous enjoint à exprimer nos sentiments afin qu’ils n’éclatent pas face aux personnes que l’on aime.
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