Mark Waid et Dan Mora collaborent sur une nouvelle série, hommage à l’âge d’argent des super-héros, à une époque où Dick Grayson portait encore le costume de Robin.
Avec lui, nous revivons quelques unes des aventures « oubliées » du plus iconique des duos : Batman et Superman
Tome 1 : Le diable Nezha
Superman en péril
Après un énième affrontement face à Metallo, les pouvoirs de Superman semblent profondément affectés.
Il fait alors appelle à la personne en qui il a le plus confiance : Batman, accompagné de son acolyte Robin.
Ensemble, ils explorent de nombreuses pistes les amenant jusqu’au repaire de la mystérieuse Doom Patrol.
Le duo de superhéros ne se doute pas que cette étape n’est que le prémisse à un affrontement bien plus périlleux pour les super héros et …. le monde entier.
Enfer et voyage dans le temps
Avec Batman Superman, World’s Finest, Mark Waid cherche à retrouver l’ambiance qu’il chérissait en tant que jeune lecteur de comics.
Un peu comme Alan Davis avec Jla : faute d’un clou, le scénariste américain est nostalgique d’une époque où les super héros se confrontaient à de véritables défis sans forcement tomber dans la noirceur qui caractérisent nombre de récits actuels.
On pourra trouver ce premier cycle de World’s Finest assez classique.
Mais Mark Waid ne cherche pas à bouleverser le monde balisé de Superman et Batman.
Son but premier reste le divertissement, rien de plus.
Il n’est d’ailleurs pas anodin de localiser la série dans un passé plus « positif », bien loin des traumas de l’ère moderne.
Dick Grayson est encore ce Robin bondissant aux répliques cinglantes mais un peu immature nous rappelant le ton du Nightwing de Tom Taylor.
Si on sent, par les multiples easters eggs que s’amuse à distiller Mark Waid, que le jeune garçon rêve d’indépendance, il s’amuse encore auprès de son mentor.
De son côté, Superman a recueilli sa jeune cousine Supergirl avec laquelle il collabore régulièrement.
Malgré le titre de la série, le scénariste ne se contente pas du duo iconique.
Son érudition de l’univers Dc l’oblige à faire participer de nombreux personnages plus ou moins connus, à l’image de la Doom Patrol.
Quant à Supergirl et Robin, ils participent activement à l’action, faisant de ce duo un quatuor.
C’est aussi une des réussite de ce comics.
Mark Waid a de la bouteille et sait parfaitement écrire un récit de super héros efficace.
La menace est inquiètante, les scènes d’actions épiques et les personnages impeccablement caractérisés.
Il n’y a aucune prétention, hormis un amour profond pour ces héros et leur univers.
Batman Superman World’s finest est facile d’accès même si l’auteur est assez malin pour raccorder, plutôt finement, son récit à des évènements actuels.
Au final, il fait ce qu’on a toujours adoré dans les comics.
Ecrire une bonne histoire tout en nous appâtant sur des évènements connexes.
Tome 2 : Un étrange visiteur
Premier pas dans le Elseworld
Dans un Gotham City parallèle, en proie à une destruction massive, des parents tentent de sauver leur enfant, David Sikela, en l’envoyant dans une capsule, traverser la barrière des univers parallèles.
C’est ainsi qu’il se retrouve sur Terre, récupéré in extremis par le trio Batman, Superman, Robin.
L’enfant, investi de nouveaux pouvoirs, prend le nom de Boy Thunder et s’entraîne aux côtés de Superman.
Mais ce dernier est hanté par un secret inavouable et une colère profonde qu’il peine à contenir.
Un nouveau super héros en forme d’échos
Comme pour le premier run, ce second opus de Batman Superman World’s finest reste classique.
Malgré tout, c’est avec ce tome, qui peut se lire indépendamment, que Mark Waid montre toute son expertise.
Les Elseworlds, mondes parallèles, font partie de l’ADN de Dc comics.
Leur utilisation est ancrée à son histoire causant même la première grande crise superhéroique : Crisis on infinite earth.
Du coup, en ramenant ce jeune garçon d’un univers parallèle, il puise entièrement dans l’histoire de l’éditeur mainstream.
On ne clamera pas que Boy Thunder est le premier héros dérivé d’une terre parallèle mais il arrive à un moment où ni Batman ni Superman n’ont connaissance d’un tel phénomène.
Boy Thunder est d’ailleurs un personnage très intéressant.
Autant par ses origines faisant clairement écho à celles de Superman que par sa caractérisation qui nous décrit un jeune homme perturbé, ne se sentant pas à la hauteur des responsabilités qui lui sont imposées.
C’est sans doute en cela que le discours de Supergirl, aussi juste soit-il, ne changera rien à ses ressentiments.
On aurait pu craindre, au vu de la couverture, une énième utilisation du Joker.
Cependant, Mark Waid joue le « filou » , préparant ainsi une révélation assez inattendue.
A noter que Batman est un peu en retrait sur ce volume.
Il va même se faire voler la vedette par un Robin plutôt taquin.
Le scénariste montre un intérêt plus important pour un Superman ou un Robin symbolisant la luminosité qu’il aime des comics.
Contrairement à Batman qui est, en parti, à l’origine de la noirceur du genre super héroïque.
Tome 3 : Élémentaire
Un coupable idéal
Alors que Simon Stagg est retrouvé mort, le coupable semble tout désigné.
Rex Mason, connu sous l’identité du super héros Métamorpho, a gardé une certaine rancoeur contre le richissime homme d’affaire.
Mais Jimmy Olsen, qui enquête de son côté, se dirige vers une toute autre piste.
Celle d’un des concurrents du défunt homme d’affaire : Bruce Wayne.
L’enquête se corse.
Polar superhéroique ?
Tout comme les précédents volumes, ce troisième opus est auto contenu et peut se lire de façon indépendante.
Si, sur le premier tome, Superman s’était retrouvé amoindri, c’est au tour de Batman d’être « empêché ».
Le plus grand des détectives se retrouve sur la liste des suspects et épié, il ne peut enfiler son costume.
L’idée est séduisante surtout que, de façon ironique, Mark Waid se moque de l’incapacité du héros à donner sa confiance à Métamorpho contrairement à un Superman qui ne doute aucunement de ses coéquipiers.
L’intrigue est efficace, même si on regrette que l’enquête soit rapidement mise de côté pour se transformer en un simple récit d’action.
Le scénariste pioche allègrement, et pour notre plus grand plaisir, dans le catalogue de DC comics.
Mais, si l’ennemi est inattendu, sa présence sert avant tout de prétexte à cette réunion de super héros plus ou moins connus.
Cependant, la série reste un agréable moment de lecture.
On est en face d’un comics tout public, facile d’accès, dont l’objectif est simple : nous divertir. Et c’est réussi !
Tome 4 : Que son règne vienne
Un hommage évident
Alors que Flash explore à toute vitesse la multitude d’univers parallèle, il retrouve la trace de Boy Thunder.
Il en réfère immédiatement à Superman et Batman qui ne perdent pas une minute pour porter secours à leur jeune pupille.
Mais le voyage les amènent dans un monde, ravagé par une catastrophe contre laquelle les Batman et Superman de cet univers n’ont, à priori, rien pu faire .
Prequel à Kingdom Come
Franchement, j’avais énormément d’attente envers ce tome 4.
Peut être un peu trop même si attention, on est sur une belle proposition de la part de Mark Waid.
Déjà, le volume se divise en 2 plus les annexes.
La première partie revient sur le passé de nos héros et leur première alliance.
L’histoire reprend le principe assez typique d’une collaboration d’ennemi provoquant une alliance de héros mais ne cherche pas vraiment à aller plus loin.
Reste que certaines scènes entre Clark et Bruce sont assez savoureuses et que le cliffhanger nous laisse avec quelques questions.
La seconde est celle qui nous intéresse en priorité.
Elle fait suite au tome 2 en reprenant l’intrigue autour de Boy Thunder.
Ainsi, Superman et Batman se retrouve dans un univers cher à Mark Waid et aux amateurs de comics : celui de Kingdom Come.
En faisant ce choix de prequel, le scénariste peut ainsi revenir sur un personnage majeur de cette saga : Magog.
Et j’avoue que l’approche de Mark Waid m’a surpris.
On est vraiment sur quelque chose de très diffèrent de Kingdom Come.
on retrouve les personnages, les clins d’oeils sont nombreux mais l’ambiance n’est franchement pas la même.
Cela peut désarçonner même si au final, j’ai apprécié d’avoir été contrarié dans mes attentes.
Surtout que la scène finale est franchement chouette.
Si j’ai un bémol, ça serait sur Superman dont j’ai trouvé les réactions assez extrêmes notamment vis à vis de son homologue de la Terre 22, surtout quand on connaît son histoire.
Au final, je m’attendais à un tome explosif et c’est juste une bonne histoire, dans la moyenne haute de la série.
Cela n’enlève en rien à la qualité de l’ensemble et ça permet de relativiser nos attentes.
Du pur comics de super-héros
L’artiste pillier : Dan Mora
Dan Mora est l’architecte principal du titre.
Pur produit du comics mainstream, le dessinateur, originaire du Costa Rica, est aussi talentueux que régulier.
Son trait, acéré et détaillé, rappelle à certains égards le style d’un Greg Capullo.
On y retrouve cette facilité à pouvoir donner corps à n’importe quel personnage dans n’importe quel environnement avec une facilité déconcertante.
Ces cadrages sont variés, usant d’inserts et de dépassements de cases pour dynamiser (voire dynamiter) sa narration.
Cela donne des scènes d’actions fluides et explosives pour notre plus grand plaisir.
Si Dan Mora laisse le dernier chapitre de chaque tome à un autre dessinateur.rice, cela n’enlève rien à sa régularité, d’autant plus que l’auteur travaille en parallèle sur plusieurs comics : Once & Future (avec Kieron Gillen au scénario) et Shazam, avec Mark Waid.
Des fill-iners de qualité
Si nous n’avons pas abordé les chapitres annexes, c’est pour deux raisons.
La première est que, d’un point de vue scénaristique, ceux-ci sont assez anecdotiques.
Le rendez-vous manqué entre Robin et Supergirl est amusant mais le retour de Robin dans le cirque frôle ridicule.
Graphiquement, on retrouve cette inégalité.
Sur le premier, c’est Travis Moore qui s’y colle.
Son style, axé vers un certain réalisme, offre avec un peu d’irrégularités quelques belles cases.
Sur le second, la prestation d’Emanuela Lupacchino retient plus notre attention.
Après avoir fait ses premières armes chez Marvel comics, notamment sur le X-Factor de Peter David, on la retrouve ici avec un certain plaisir.
Son dessin, aux formes rondes et souples est toujours aussi élégant et gagne en précision.
Son trait colle à merveille à Supergirl ( qui, d’une certaine façon, lui ressemble beaucoup) et rappelle, à certains égards, l’approche d’un Gary Frank.
On espère la retrouver rapidement sur une série régulière.
Sur le tome 4, l’annual donne les clés de la série à 3 équipes :
– Mark Waid / Cullen Bun et Edwin Salmon au dessin
– Dennis Culver et Travis Mercer
– Christopher Cantwell et Jorge Fornes.
Sur ces 3 équipes, je retiendrais essentiellement la prestation de la troisième consacré au Challenger de l’inconnu.
L’histoire est plus interessante et surtout le dessin de Jorge Fornes , dans sa patte semi réaliste, est juste impeccable.
En résumé
Batman Superman World's finest de Mark Waid et Dan Mora (entre autres) est une série efficace et divertissante.
Sans réinventer le genre, Mark Waid puise avant tout dans le passé des super-héros pour écrire des intrigues simples rendant hommage à une ère bien lointaine où les super-héros se prenaient moins la tête (quoique...)
Il en profite aussi pour faire un hommage appuyé à une de ses grandes histoires : Kingdom Come.
Dan Mora est le dessinateur adéquat pour illustrer les multiples personnages et environnements que s'amuse à mettre en scène le scénariste.
Il est plaisant de voir un duo fonctionner ainsi en osmose.
Les chapitres annexes pourront décevoir mais on retiendra l'excellente prestation d'Emanuela Luppachino sur une saynète amusante et celle de Jorge Fornes consacrée aux méconnus Challengers de l'inconnu.
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