Un clou.
Un simple clou planté dans le pneu d’une roue et tout un monde qui change.
Par la faute de ce clou, les Kent ne prendront pas la route ce soir-là et ne remarqueront pas ce vaisseau spatial transpercé le ciel.
Par la faute d’un clou, la Justice League doit faire sans Superman.
Hommage à l’âge d’argent des comics de superhéros
une Justice League sans Superman
Justice League : Faute d’un clou est la réunion de deux mini-séries écrites et dessinées par Alan Davis mettant en scène un monde alternatif sans Superman.
Tout cela à cause d’un clou.
Cette idée, assez géniale, de l’auteur britannique démontre qu’un « petit rien » peut provoquer d’énormes chamboulements.
Un rempart contre les préjugés
Et ces bouleversements sont visibles dès les premières pages de l’album.
Metropolis vient d’élire son nouveau maire, Lex Luthor, tête pensante d’un mouvement anti méta-humain.
Cette scène résume à elle seule la problématique de ce monde et en quoi la figure rassurante de Superman manque.
On l’oublie vite mais le super héros n’est rien d’autre qu’un immigré et en choisissant la « voie du bien », de par l’éducation de ses parents adoptifs ( mais pas que, comme le démontre Superman For all seasons ), il devient le symbole des apports bénéfiques de cette immigration.
Un monde sans Superman, c’est un monde moins tolérant et plus méfiant face à la « menace extraterrestre ».
On retrouve dans l’atmosphère, notamment de la première partie, ce côté paranoïaque qui a hanté l’histoire américaine.
Même si ici le communiste est remplacé par l’être venu de de l’espace.
Une place désespérément vide
Son absence se ressent aussi dans les rangs de la JLA.
Le groupe, composé de Batman, Wonder Woman, Green Lantern , Flash, Aquaman , Hawkgirl, Atom et le Limier Martien existe bel et bien mais n’est mené par aucun modèle.
S’il semble qu’Alan Davis concède le rôle de leader à Green Lantern, ce dernier n’arrive aucunement à calmer les tensions qui gangrènent le groupe.
Si Batman et la plupart des personnages sont égaux à eux-mêmes, on ressent parfaitement le manque crucial qui pèse sur l’équipe.
Un vide qui frappe de plein fouet dans la destinée de Batman auquel Alan Davis réserve un sort tout particulier.
À partir de cette base, l’auteur pose les pions de sa machination, tout en rappelant à notre bon souvenir des échos d’un personnage absent mais dont l’ombre va peser lourd sur l’intrigue.
Un hommage vibrant à l’âge d’argent
Avec Justice League : Faute d’un clou, Alan Davis parsème son récit d’inspirations qui lui sont chères.
De son propre aveu, celles-ci sont fortement influencées par l’âge d’argent.
On le remarque tout d’abord dans le choix des personnages.
Flash est Barry Allen et Green Lantern Hal Jordan. Deux personnages qui ont repris du service depuis mais qui avaient été remplacés lors de l’âge moderne.
Avec ces deux icônes de la culture super héroïque, l’auteur remémore à ses lecteurs.rices une époque colorée et fantaisiste mais néanmoins intense.
Le ton adopté est typique de l’ère d’argent.
C’est avant tout un récit de super héros où les identités civiles ont peu de rôles à jouer.
Alan Davis assume son goût pour les conflits d’ampleur et les affrontements cosmiques, à l’image de la scène d’introduction d’un autre clou.
Le récit nous emporte de la première à la dernière page sans jamais tomber dans l’excès de nostalgie.
L’écriture reste épique et moderne et la première partie se montre brillante en terme d’équilibre.
Tout est pensé avec intelligence et mène vers des révélations inattendues.
Un autre clou surjoue sur l’explosivité des grandes crises qui ont marqué l’histoire de Dc Comics.
Le récit se retrouve plus axé sur l’action que sur l’émotion ou le suspense.
Cependant, Alan Davis raccroche merveilleusement les wagons et les réflexions qui tournent autour de Superman sont parfaitement menées.
Du grand Alan Davis
Quand sort Le clou, Alan Davis est loin d’être un novice que cela soit en tant que dessinateur ou scénariste.
Son run en solo sur Excalibur en est sans doute la meilleure preuve.
Graphiquement, on retrouve chez le dessinateur une grande partie des codes du comics Us.
Son trait se caractérise par la fluidité et l’expressivité de ses personnages.
La souplesse et les variations de l’encrage de Mark Farmer reproduisent à la perfection ses crayonnés détaillés et minutieux.
Sur ce récit, Alan Davis souhaite reproduire la structure des récits de l’âge d’argent en reprenant le principe des pleines pages pour illustrer les exploits des super héros.
Sa mise en page, typique de l’école américaine, use ( sans abuser) d’inserts, de dépassements de case et autres « splash page » pour nous en mettre plein la vue et dynamiser une narration réglée comme une horloge.
Niveau cadrage, il semble s’être un peu plus « lâché » sur la seconde partie se permettant de reprendre ses fameuses cases biseautées et géométriques insufflant rythme et modernité à son récit.
En résumé
Justice League : Faute d'un clou est un pur récit mainstream. Reprenant le principe des elseworld, Alan Davis met en scène un monde qui vit sans la figure rassurante de Superman. À travers ce récit, l'auteur britannique rend hommage au comics de sa jeunesse, peuplé de personnages hauts en couleur et d'affrontements tous plus dantesques les uns que les autres. Si la première mini série est plus équilibrée et porteuse de grands moments d'émotions, la seconde partie offre un final épique à cette saga.
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