J’aime les grandes aventures mais j’ai aussi un grand penchant pour les récits d’enquête, et celles de Sherlock Holmes en particulier. Stéphane Michaka, script-editor pour la télévision, dramaturge et traducteur de romans anglophones, a réussi à combiner les deux dans son dernier roman intitulé De larmes et d’écumes. Une aventure pleine de suspense et d’émotion, où se mêlent les destins de James Finch et Basil Huntley, deux enquêteurs. Et celui d’Elsie, une jeune femme disparue dont la présence sur la Mary Celeste, un navire réapparu 12 ans plus tard sans vie à bord, reste mystérieuse.
La goélette fantôme
Le 4 décembre 1872, les marins de la Dei Gratia n’en croient pas leurs yeux. Devant eux se trouve une goélette en parfait état mais ouverte à tous les vents. A son bord, il n’y a pas âme qui vive. Seulement la trace d’un petit corps sur le lit du capitaine…
Il s’agit de la Mary Celeste, un navire embarqué de New York pour Gênes avec à son bord, en plus de l’équipage et du capitaine Briggs, son épouse Sarah, sa fille Sophia. Et une gouvernante, non répertoriée dans la liste des passagers.
Mais pour moi comme pour tous ceux que passionne l’océan, cette goélette a toujours représenté le mystère ultime. Il n’a fait que s’épaissie au fil des ans. Cette histoire, à force d’être racontée, relayée de port en port, s’est enveloppée de brumes supplémentaires. Chaque conteur y ajoute sa petite touche. Son détail incongru.
Onze ans après, qui pourrait démêler le vrai du faux ?
11 ans plus tard, le mystère reste entier. Seul un jeune homme nommé James « Spotty » Finch, orphelin, fraichement débarqué pour entrer dans une des plus grosses compagnies d’assurances maritimes de la City, semble encore s’y intéresser. Mais lorsqu’il rencontre Basil Huntley, employé du bureau des enquêtes de l’Atlantic Mutual, il se rend compte qu’ils partagent bien plus que l’amour de l’océan. Basil est personnellement et sentimentalement impliqué dans la disparition des membres de la Mary Celeste. Et particulièrement celle d’Elsie, son amour de jeunesse, montée anonymement sur le bateau.
Sur la piste d’Elsie
Les chapitres de De larmes et d’écume alternent l’enquête menée par Basil et Finch à Londres en 1882 et le récit du voyage d’Elsie. Les pièces du puzzle mystérieux de cette disparition se mettent peu à peu en place à travers la découverte du journal de bord tenu par la jeune femme pendant son voyage et les souvenirs de jeunesse de Basil. Ce carnet est une source précieuse pour comprendre comment Elsie s’est retrouvée à bord de la Mary Celeste. Et ce qui lui est arrivé.
Les retours en arrière nous dévoilent alors sa vie anglaise, entre une famille endeuillée et un beau-père manipulateur et cruel. La rencontre lumineuse avec Basil, leur amour caché et le départ précipité et subi pour les Etats Unis.
Dès lors, le journal de bord tenu par Elsie va réveiller l’espoir de l’enquêteur de retrouver vivante la jeune femme. Celle qu’il n’a jamais oubliée.
Tout laisse penser qu’il n’y a aucun survivant.
– Vous avez raison, Basil. Ce que je veux, ce n’est pas seulement savoir. Mais espérer.
– Espérer ?
– Oui. Espérer avec vous que la passagère clandestine de la Mary Celeste se nomme Elsie MacKentrick. Et qu’elle est encore en vie.
Aux côtés de Finch et Huntler, nous allons donc vibrer au rythme des tempêtes, des rebondissements amoureux. Et des plans machivéliques de M. Brooks, le beau-père diabolique d’Elsie.
L’écriture de Stéphane Michaka est vive, intense, pleine d’émotions et mêle des envolées poétiques lors des passages en mer et des moments de suspense haletants lors des scènes d’action, de poursuite ou de combat.
On tourne les pages avec avidité et gourmandise, emportés par l’aventure et l’intrigue, finement nouée et ancrée dans un contexte historique plus vrai que nature.
Pourquoi lire De larmes et d’écume ?
De larmes et d'écume de Stéphane Michaka est un roman qui ne laisse que peu de temps pour reprendre son souffle. L'aventure maritime est pleine de tempêtes et de suspense, l'enquête haletante et frissonnante, les sentiments puissants et les personnages attachants. Les lecteurs apprécieront même la noirceur d'un M. Brooks, manipulateur à souhait.
Un roman qui emporte et qui vibre encore une fois ses pages refermées.
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