Le voyage de Shuna (Hayao Miyazaki)

Alors que vient de sortir au cinéma Le Garçon et le héron, le dernier film d’animation de Hayao Miyazaki, les éditions Sarbacane publient pour la première fois en France Le Voyage de Shuna. Créé en 1983, cet album-manga raconte l’histoire d’un jeune prince qui va partir en quête d’une céréale résistante pour sauver son peuple de la famine.

Un voyage initiatique

Que l’on connaisse ou non l’oeuvre de Hayao Miyazaki, Le Voyage de Shuna est un événement.

D’abord parce que les oeuvres éditées du créateur japonais se comptent sur les doigts de la main. Sa grande oeuvre en tant que mangaka reste Nausicaä de la vallée du vent. Un récit de fantaisie empreint d’écologie et d’aventure dans des univers merveilleux.

Ensuite, parce que la publication française était attendue depuis 40 ans.

Nous découvrons, dès les premières pages, le paysage en pleine largeur peint à l’aquarelle d’un petit village au creux d’une vallée, entouré de hautes falaises.

Le lecteur ne s’y trompera pas : nous sommes dans un conte. Mais un conte à la Miyazaki, c’est-à-dire dont le propos peut parler à la fois d’un monde ancien mais aussi d’un monde à venir. Un conte philosophique qui amènera, au travers de la quête de Shuna, à réfléchir à notre rapport à la nature. Aux autres êtres humains et aux divinités aussi.

Le long voyage dans lequel se lance le prince est juste : il veut trouver un moyen de sauver son peuple. Mais, dès le départ, ce périple n’est pas encouragé par la population. Car traditionnellement, on nait, on vit et on meurt sur sa terre.

Et, comme dans tout voyage initiatique, la séparation d’avec sa famille et la découverte d’un monde étranger (ou plutôt de mondes) vont éprouver le jeune prince.

Un cavalier solitaire et sa monture

A la manière d’un « lonesome cowboy », Shuna se lance donc vers l’Ouest avec sa monture, un yakkuru. Comme souvent dans les histoires de Miyazaki, la relation avec l’animal est bien plus que domestique. La bête rappellera évidemment la monture d’Ashitaka dans Princesse Mononoké.

Il va traverser un désert, une plaine, un village où se réunissent des marchands d’esclaves. Mais aussi un monde aquatique mystérieux, pour finir dans les hauteurs d’une montagne.

Sur son chemin, les obstacles seront nombreux, tant naturels qu’humains. Et même surtout humains car les peuples rencontrés sont soit dominateurs, soit asservis.

Mais c’est surtout la rencontre avec deux soeurs qu’il va libérer de leurs maitres esclavagistes qui va bouleverser son voyage.

Un conte des grands espaces

Feuilleter et plonger dans Le Voyage de Shuna, c’est vivre une expérience de contemplation animée.

En effet, le dessin de Hayao Miyazaki offre des paysages larges et ouverts, parfois étrangement vides et pleins de solitude, et d’autres fois densément peuplés et foisonnants.

Un monde foisonnant

Comme le dit si bien Alex Dudok De Wit dans la postface, « on voit les germes des personnages, des décors et des thèmes qui fleuriront dans le travail de Hayao Miyazaki par la suite. »

Mais l’aventure n’est pas que découverte de mondes paisibles ! Les scènes d’action trouvent aussi leur place avec un traitement particulièrement réussi des mouvements et des angles, notamment lors des passages d’attaque ou de combat.

L’esprit de ce récit reste finalement assez « intérieur » et philosophique. En effet, le voyage c’est surtout celui d’un garçon qui va devenir un homme en bravant la cruauté des humains, les divinités qui s’opposent à lui et même les éléments naturels. Et ces combats ne seront pas de tout repos.

D’ailleurs, l’auteur laisse même sous-entendre que cette histoire n’est pas terminée, à la fin de l’ouvrage…

Pourquoi lire Le Voyage de Shuna ?

Le Voyage de Shuna est un récit universel qui s'adresse autant aux fans du réalisateur de films d'animation qu'est Hayao Miyazaki, qui retrouveront ici son univers foisonnant et ses personnages en quête de paix, qu'aux novices qui découvriront tout le talent de dessinateur et de conteur du maitre japonais. 

L'aventure est grandiose, les paysages somptueux et les interrogations sur l'humanité et son rapport à la nature toujours d'actualité.

Prix et récompenses

  • Prix Daruma du meilleur One Shot / Japan Expo – Sélection 2024
  • Prix Daruma du meilleur dessin – Sélection 2024
  • Prix Daruma du Patrimoine / Japan Expo – Sélection 2024
  • Prix Babelio 2024 – Manga
  • Prix Émile Guimet de littérature asiatique / Musée national des arts asiatiques – Guimet – Sélection 2024
  • Éco-Fauve RAJA / Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême – Sélection 2024
  • Prix des Libraires de Bande-dessinée / Canal BD – Sélection 2024
  • Eisner Award 2023 – Best U.S. Edition of International Material – Asia

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2 réflexions sur “Le voyage de Shuna (Hayao Miyazaki)”

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