Seven Sons (Robert Windom / Kelvin Mao / Jae Lee / June Chung)

Le 7 juillet 1977, 7 fils identiques en tous points, naissent au même moment aux 4 coins du monde.
Selon la prédiction de Nicolaus, qui a pris en charge ces nouveaux nés, il y a parmi eux le véritable fils de Dieu qui dirigera l’humanité vers un nouvel âge d’or.

Mais cette nouvelle croyance n’est pas du goût de tous et des actes terroristes éclatent pour éliminer un à un ces prétendus élus.

Seven Sons : un comics religieux ?

7 pour le prix d’un

La révélation

Seven Sons, du duo de scénaristes Robert Windom et Kelvin Mao, part d’une idée plutôt originale.
Dieu a envoyé sur Terre sept enfants, un seul d’entre eux est son véritable héritier.

Tous recueilli par le pieux Nicolaus, il essaie de les protéger d’une organisation terroriste musulmane « les gardiens d’Allah ».
Ces derniers estiment que les Jèsis (les 7 enfants) sont de faux prophètes.
Avec un tel propos, on pourrait craindre un certain prosélytisme religieux mais on comprend assez rapidement que la dévotion de cette société s’est faite au prix de nombreux secrets.

A l’instar du Punk Rock Jesus de Sean Murphy, les auteurs décrivent par petites touches l’organisation quasi commerciale de cette nouvelle religion : communication outrancière, merchandising et publicité…
Le tout agrémenté par des acoitances politiques qui posent forcement question.
Même si, aux État-Unis, le rapport entre la religion et la politique est plus étroit qu’en France.

Au final, tout est mis en place pour propager la foi à travers la monde.
Et cela marche.
Le peuple se convertit en masse et les autres religions pâtissent de ce quasi monopole.
Ce qui, d’une certaine façon, pourrait expliquer les actions des gardiens d’Allah.
Mais les choses ne sont pas aussi simples que cela.

Croyance et tolérance

La caricature du terrorisme ?

On sait à quel point la religion est un sujet sensible aux États-Unis.
Les pièges sont posés : des personnages christiques, des musulmans terroristes et une population en complète adoration devant cette religion qui, selon les dires de Nicolaus, a changé le monde positivement.

Mais Robert Windom et Kelvin Mao sont assez malins pour ne pas tomber dans le piège.
Usant d’une narration éclatée, ils vont mettre à jour une histoire secrète qui s’éloigne petit à petit du récit moralisateur.
Au final, toutes ces manipulations restent assez évidentes et la révélation n’étonnera pas forcément le lecteur(rice) assidu(e).

Cependant, l’intérêt de Seven Sons est à chercher plus dans son message que dans son intrigue.
En effet, les auteurs ne critiquent pas profondément la religion mais démontrent que l’acte religieux est meilleur s’il prend en compte toutes les diversités.
Une religion ne doit pas prendre le pas sur les autres mais faire preuve d’ouverture d’esprit.
Catholicisme, protestantisme, hindouisme et même islam, toutes ces croyances peuvent et doivent vivre dans le respect des autres.

D’ailleurs, le cas des musulmans est assez intéressant.
Décrits de façon caricaturale par le biais des gardiens d’Allah, on comprend, notamment par le personnage de Sophia, qu’il n’est pas question de dévaloriser cette religion.
Au vu de l’évolution du récit, c’est même le contraire.

De même, Robert Windom et Kelvin Mao font une mise en garde nécessaire sur l’utilisation de la religion par les groupuscules extrémistes.
Les actions des gardiens d’Allah en sont une démonstration mais celle, plus perverse, des groupes d’extrême droite en est une autre.

Alors, est-ce que Seven Sons est un comics religieux ?
Peut être mais c’est avant tout un comics qui prône la tolérance entre toutes les religions.

Reste cette fin.
Brutale et sujette à de nombreuses interprétations.
La mienne est la suivante : et si la grande manipulation venait d’ailleurs ?

Le retour de Jae Lee

L’originalité du cadrage géométrique

Jae Lee est un auteur rare.
Découvert avec la série Namor : the submariner, l’auteur y a développé un style sombre et rugueux qui fera pendant longtemps sa marque de fabrique.

Mais c’est avec Hellshock, comics très personnel, qu’il passe une étape en terme de stylisation.
À partir de cette mini-série, il assouplit son trait, adopte des postures plus réalistes mais conserve ce profond amour pour la gestion des noirs et blancs.
Il explose avec les Inhumains, en collaboration avec Paul Jenkins, puis délaisse petit à petit les comics pour se consacrer à l’illustration de couverture.
Une nouvelle fois, son style va s’adapter.
Ses compositions deviennent géométriques, stylisées au maximum autour de personnages et d’un décor souvent minimalistes.

Si sa maitrise graphique atteint la perfection, certains lui reprocheront une approche froide et répétitive.
Mais pour les fans, Seven Sons s’avère un véritable cadeau.

On notera d’ailleurs l’adoption de cadrages géométriques originaux qui profitent aussi à la stylisation extrême de son dessin, sans pour autant nuire à la lecture, ce qui est en soi une véritable prouesse.

June Chung, coloriste et conjointe de Jae Lee, est la collaboratrice idéale.
Avec un fonctionnement quasiment en binôme, elle apporte de judicieux compléments aux arrière-plans du dessinateur.

En résumé

Seven Sons de Robert Windom et Kelvin Mao est une oeuvre qui pourra en désarçonner certains. 
Pourtant, derrière un premier chapitre faussement caricatural, les auteurs développent une intrigue certes critique mais aussi ouverte d'esprit.

Jae Lee, qui signe ici un retour remarqué, est au top de sa forme. 
L'élégance et la noirceur de son dessin conviennent parfaitement à l'atmosphère et aux personnages qui, derrière leur pureté de façade, cachent de nombreux secrets inavouables. 

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