Mots Tordus et Bulles Carrées

Wonder Woman : Dead Earth (Daniel Warren Johnson)

Wonder Woman se réveille dans un monde dévasté par la folie humaine.
Diminuée physiquement et sans aucun souvenir des évènements passés, elle rejoint un groupe de survivants pour les aider à trouver un nouvel eden.
Mais si le monde a changé, l’humanité, elle, reste la même …

Un auteur à part

Daniel Warren Johnson est un auteur de la « nouvelle génération » que j’apprécie énormément.

Découvert un peu au hasard avec Space Mullet ! (publié par Ankama), un space opéra à la sauce Star Wars qui dénotait par son graphisme dynamique et ses personnages attachants (la marque de fabrique de l’auteur), c’est surtout avec Extremity, récit de Sf post apocalyptique que je suis réellement devenu un adepte inconditionnel de son travail. Cette œuvre, aux multiples ramifications, résume à elle seule tout le talent de l’auteur et reste pour moi son chef d’œuvre.
Malgré un style radical, en opposition avec les codes du comics mainstream, il ne faudra pas longtemps aux majors pour faire appel à ses services.
Mais un auteur comme Daniel Warren Johnson ne peut pas se retrouver embarqué sur sur une série et suivre les impératifs d’un univers global.
Il a besoin de liberté et c’est avec intelligence que Dc Comics lui permet d’exprimer toute sa créativité sur Wonder Woman : Dead earth, un récit poignant qui, malgré une idée de départ assez classique, s’avère étonnant à plusieurs égards.

Un dessin unique

Des scènes d’action époustouflante

Tout d’abord, il y a ce qui saute aux yeux dès la couverture : le dessin de Daniel Warren Johnson.
Avec son trait plutôt instinctif et brut de décoffrage, l’auteur ne cherche aucunement la stylisation. C’est crade, sec, violent, avec quelques imperfections anatomiques ou de perspective mais ses « errements » techniques sont compensés par une vitalité et un souffle qui se déchaine tout au long de ce one shot. Avec lui, il faut que ça dépote.
Sa narration, particulièrement explosive et dynamique convient à la perfection aux enchaînements de combats qui se font avec une brutalité correspondant à l’atmosphère profondément désespérée de ce futur.

Ses affrontements ont quelque chose d’absolument jouissif, ce qui, d’une certaine façon, rappelle la vitalité des mangas dont on retrouve une certaine inspiration ( il cite notamment Ghost in the Shell et Akira).

Si on peut y voir un côté Mad Max (une influence qu’on retrouvait déjà dans Extremity) , c’est surtout le côté invasions barbares qui marque les esprits.
Que ce soit la scène dans l’arène ou les cris de guerre lancés par l’amazone pour motiver ses troupes au combat, on est plus proche du récit de guerre moyen-âgeuse que de celui du super-héros.

Une vision personnelle de Wonder Woman

Une interprétation personnelle de Wonder Woman

Ensuite, il y a Wonder Woman.

Première véritable super-héroïne, elle symbolise ( que ce soit par l’histoire de sa création et par son évolution), d’une certaine façon, l’évolution de l’image de la femme dans les comics.

Le traitement graphique que lui apporte Daniel Warren Johnson est certes radical mais il n’est que l’étape ultime de cette évolution.

Alors, oui, je peux comprendre que ça puisse surprendre.
On est loin des canons qu’on nous sert habituellement sur la super-héroïne et on sent que l’auteur s’est amusé à se délester de toute la sensualité de l’amazone pour se concentrer sur cette carrure de guerrière (lorgnant plus vers la barbare comme le montre judicieusement la couverture de l’album).
Bye bye le top modèle aux proportions divines et aux jambes interminables et bonjour la barbare ébouriffée aux imperfections typiquement humaines.
Si cette interprétation peut s’expliquer par une simple histoire de style, l’auteur la justifie tout au long du récit et démontre qu’au fond, Wonder Woman, c’est un peu tout ça : une guerrière, un guide, une femme, une fille et une amazone qui se rêve plus humaine que déesse.
La brutalité, voire la rage qui malgré tout gangrène le personnage, atteindra d’ailleurs son paroxysme dans une scène capitale ( dont je ne dirai rien de plus pour éviter les spoilers) d’une rare violence, surtout au vu du contexte et des personnages concernés par cette dernière.

Le dilemme de Wonder Woman

Wonder Woman n’a pu empêcher la fin du monde

Malgré tout, il ne faudrait pas se tromper et croire que Wonder Woman : Dead Earth est un simple récit d’action.

Derrière cela, il y a une analyse assez profonde du rapport qu’entretient Diana avec l’espèce humaine et avec sa famille : les amazones.
Car si j’ai précisé que l’auteur s’était penché, avec réussite, sur la guerrière, il n’a pas oublié que le personnage a toujours été marqué par sa dualité.
Et c’est ce qui la rend complexe et intéressante : elle cherche la paix pour les hommes mais doit combattre pour l’obtenir. Elle aime les humains mais doit abandonner sa famille pour les protéger.
Au début du récit , elle exprime d’ailleurs un profond attachement aux survivants, n’hésitant pas à parler d’amour.
Un amour qui n’est d’ailleurs pas réciproque. Tout le monde l’a oublié et rare sont ceux qui lui font confiance.

 » Qu’est ce que tu faisais dans le passé ? »
 » J’étais une protectrice de la Terre. »
« On dirait que tu as échoué »

Ce dialogue exprime à lui seul la responsabilité qu’elle ressent vis à vis de ces survivants.
Wonder Woman est un personnage profondément attachant et émouvant, qui vit avant tout pour les autres, prête à accorder sa confiance et ayant un profond sens de la justice et de la diplomatie.
C’est aussi une femme qu’on a voulu puissante (pour se venger de l’oppression des hommes) et qui se retrouve à gérer une rage qui peut l’amener à commettre l’irréparable.
Paradoxalement, si le récit de Daniel Warren Johnson est violent, il est avant tout une ode à la paix et au pardon, seuls remèdes contre la vengeance ( qui elle n’amène que le sang).

En résumé

Wonder Woman : Dead earth est un titre brutal, sans concession, qui fait la part belle à la guerrière sans pour autant délaisser son humanité. 

Si l'approche graphique peut surprendre, elle est en parfait accord avec un personnage qui symbolise tout autant la paix que la guerre.

Et sous les traits de Daniel Warren Johnson, c'est surtout son humanité qui vous marquera.

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