Briar (Christopher Cantwell / German Garcia)

Briar Rose est une jeune princesse à qui la vie sourit.
Belle, adulée par ses parents et ses sept fées marraines, la jeune fille n’est pourtant pas très maline.
Mise en garde contre tout ce qui est pointu, elle fonce sur un métier à tisser et se pique le doigt, provoquant son sommeil éternel.
Un seul remède pour contre-carrer la malédiction : le baiser d’un prince charmant.
Or, ce dernier a d’autres ambitions. Il préfère partir guerroyer avec le beau-père sans embrasser son épouse.
En la laissant dans cet état 10 fois 10 ans.
Et entre temps, le territoire a bien changé !

La rebelle au bois dormant

Une princesse encore charmante

Briar de Christopher Cantwell et German Garcia trouve sa source dans le conte populaire de La belle au bois dormant.
Et le concept est simple : que serait-il arrivé à la princesse si cette dernière n’avait pas été réveillée par le prince charmant ?
La réponse donne un conte cynique, légèrement grossier, mais assez addictif.

Il faut dire que l’introduction est assez réussie et que le scénariste pose parfaitement les bases de ce retournement de situation.
En effet, les princes charmants n’existent que dans le contes. En réalité, ce sont des chevaliers accordant plus d’important à la guerre qu’à l’amour.
Et celui de Briar ne déroge pas à la règle.
Il voit assez bien tout ce qu’il peut tirer de cette situation et compte bien en profiter.

Ainsi, on comprend mieux le désarroi puis la colère qui vont émerger à son réveil.
Surtout que son petit monde s’écroule un peu en même temps que son réveil.
Finie la princesse, bonjour l’esclave, la recrue puis la fuyarde.
Il y a de quoi sortir deux, trois insanités par phrase.
D’ailleurs, on ne va pas se le cacher, Briar est grossière.
Certains lui reprocheront d’ailleurs ce langage châtié mais elle est encore une petite joueuse en comparaison de Gertrude d’I hate fairyland.
Mais peut-être que Christopher Cantwell ne force pas assez le trait, hésitant par moment entre la caricature et le pur récit initiatique.

Malgré tout, sans être une révolution, le récit est assez enivrant.
Sans être original ou proposer une quelconque réflexion à l’image de son Blue Flame, le scénariste assume le simple fait de nous divertir.
Le folklore de Briar, même s’il n’est pas spécialement développé, reste solide et offre des enjeux conséquents.
Les évènements s’enchainent et la tension prend de l’ampleur au fil des chapitres.
Sans être étonné par le déroulement de l’intrigue, sa gestion rythmique est percutante et nous amène à la fin de l’album sans avoir ressenti le moindre ennui.

C’est là qu’on ressent toute l’expertise du scénariste qui, au final, fait beaucoup avec pas grand chose.

Un dessin en faux semblant

Un style classique mais efficace

Je ne l’ai pas compris tout de suite mais, en feuilletant Briar, j’ai beaucoup pensé au Saison de Sang de Matias Bergara.

Or, avec le recul, le style de German Garcia ne me semble pas aussi abouti.
Le dessinateur qui a longtemps travaillé pour les Big Two a pourtant un style agréable à l’oeil.
Ses designs, à l’image du Rampe-Mort, sont inventifs et sa mise en scène reste cohérente et efficace.
Le trait est fin et, sur certaines planches, sa vision fait des merveilles.
Son introduction de Briar, notamment, est parculièrement réussie.

Mais derrière cette patte graphique se cachent quelques lacunes évidentes qui peuvent nous laisser sur notre faim.
Si le trait est effectivement fin, il reste aussi assez peu marqué.
L’encrage n’apporte pas forcément d’aspérités ou de profondeur, et le manque de finitions devient flagrant, surtout sur les arrière-plans.
Ces derniers se font assez rares et sont seulement esquissés par quelques traits sans réelles structures.
Techniquement, l’ensemble fonctionne mais on se retrouve à chipoter, surtout que, pour le coup, le choix du format Urban ne me semble pas profitable, renforçant au contraire cette impression de vide.

Et c’est là que j’ai compris le rapport que j’ai fait avec Matias Bergara.
Tout vient de la couleur de Matheus Lopes, coloriste de Saison de sang entre autres.
C’est essentiellement par son travail que les fonds ne paraissent pas aussi vides.

L’ensemble est loin d’être mauvais.
Mais, on sent un dessinateur sur la réserve, qui tire un peu la langue sur les derniers chapitres.
D’ailleurs, German Garcia ne sera pas présent sur la suite du titre, laissant sa place à Alex Lins.
Je laisse l’instagram du dessinateur pour les plus curieux mais l’approche me semble légèrement différente.
Nous aurons le temps de regarder cela à la sortie du second tome.

En résumé

Briar de Christopher Cantwell et German Garcia n'est sans doute pas le comics de l'année. 

Malgré tout, si vous appréciez les détournements de contes et les univers fantaisistes, vous vous laisserez emporter par cette quête initiatique haletante.
Christopher Cantwell cherche avant tout à nous divertir et, de ce point de vue, c'est assez réussi.

Au dessin, German Garcia propose un travail honnête mais sans réelles aspérités.
La colorisation de Matheus Lopes apporte cependant de la profondeur de champs et une ambiance graphique générale plutôt agréable.
D'ailleurs, il n'est pas évident que le choix du format Urban soit profitable pour le dessin.

Au contraire, il semble amplifier certaines de ces lacunes, ce qui est d'autant plus dommageable qu'au prix de 19 euros pour 4 issues, la pilule est dure à avaler.

Pour lire nos chroniques sur Le conte du pêcheur ou Il était une forme

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